FRANCE
SEPTEMBRE 2021
HORS DU COMMUN
Votre magazine
offert chaque
mois avec
L’ÉPREUVE
DE FORCE
Dans la fascination
du photographe BEN
THOUARD pour les
tubes de Teahupo’o,
le « mur de crânes »
Tout dans les bras :
le Tahitien Matehau
Tetopata échappe
à la mâchoire du
monstre aquatique.
T-TR1
Robot de téléprésence mobile
commandé à distance
PRÈS DES YEUX,
PRÈS DU CŒUR.
*
*DÉPASSER L’IMPOSSIBLE
Prototype Toyota présenté. Indisponible à la vente. ©2020 Toyota Motor Corporation. Tous droits réservés.
Éditorial
À CHACUN SA
DYNAMIQUE
Ces lignes introductives nous permettent de sentir
et de vous transmettre l’esprit de chaque nouveau
The Red Bulletin. Ce qui nous saute aux yeux ce
mois-ci, c’est la notion de dynamique qui réunit
nos invités, malgré leurs réalités diverses.
Celle des vagues que documente Ben Thouard
dans un processus créatif mêlant défi physique
et fascination. Avec le pilote F1 Max Verstappen,
au-delà de l’idée attendue de vitesse, on aborde
un nouvel état d’esprit et son potentiel premier
titre de champion du monde. Chez la chanteuse
Nai Palm, nous apprécions sa capacité à toujours
avancer, malgré l’adversité.
Enfin, sur une roue ou deux, les pneus massifs
de jeunes riders new-yorkais à vélo propulsent
une nouvelle donne culturelle et sociétale aux
États-Unis : la Bike Life.
À chacun sa dynamique, croyez en la vôtre.
CONTRIBUTEURS
NOS ÉQUIPIERS
MARZ LOVEJOY
L’ancienne New-Yorkaise,
désormais installée à
Copenhague, a eu des questions
directes avant d’accepter
de couvrir la culture Bike
Life. « Il est impératif que
les Noirs, les métisses et les
autres personnes marginalisées
racontent nos histoires
à notre manière », déclare
Lovejoy, qui a auto-publié
un livre et écrit pour le
site très tendance office.
En selle avec la Bike Life.
Page 62
BEN THOUARD (COUVERTURE)
Belle lecture !
Votre Rédaction
Le photographe Ben Thouard s’immerge dans son métier – et dans les eaux de Tahiti –
avec son kit photo étanche. « Je veux faire des images intemporelles », dit-il. Page 24
BEN THOUARD
Nous avions sollicité Ben pour
lui dédier un portfolio 100 %
surf, mais le caractère hypnotisant
des vagues dans l’ouvrage
du Français nous a poussés à
aussi publier des photos sans
surfeurs. « L’aspect artistique,
plus personnel de la photo de
vagues m’a tellement attiré
que j’ai plongé dedans, c’est
le cas de le dire », explique-t-il
depuis la Polynésie française
où ce photographe réside et où
il n’a qu’à se jeter à l’eau pour
saisir ces formes aquatiques
qui le passionnent. Page 24
THE RED BULLETIN 3
CONTENUS
septembre 2021
52
Devenu zen, Max
remportera-t-il la
saison de F1 ?
8 Galerie : des performances à
couper le souffle
14 Roulettes ruse : quand le skate
recycle le chewing-gum
15 Pour un espace plus féminin
16 Karishma Ali : la footballeuse
qui change la donne au Pakistan
18 Le télétravail devient mobile
avec ce camping-car de Nissan
20 Robby Naish : le dieu du windsurf
glisse sur son destin
24 Mer forte
Pour le photographe de surf
Ben Thouard, le surfeur n’est
plus forcément au cœur du
sujet.
38 Passez au vert
Pour préserver la nature à
laquelle il doit tant, l’ultratraileur
Xavier Thévenard ne
prend plus l’avion. Et vous ?
44 Sous les cicatrices
Nai Palm, chanteuse du groupe
australien Hiatus Kaiyote,
a transformé en motivation
ses plus rudes épreuves.
52 À son tour de briller
Nous avons rencontré le pilote
de F1 Max Verstappen à Monaco.
Un nouveau Max. Au max.
62 En roue libre
Au rythme de la Bike Life newyorkaise,
où le vélo est bien plus
qu’un moyen de déplacement.
FORMULA 1/ADRIAN GREEN, BEN FRANKE, TRÉ KOCH
6 THE RED BULLETIN
62
Quand la jeunesse
US prend son envol
sur une roue.
75
44
Nai Palm ne laisse
pas les coups durs
gâcher son voyage.
Voyage : faites un saut en
Suisse méditerranéenne pour
grimper les blocs du Tessin
80 Fitness : les bienfaits d’une
bonne baignade en eau froide
81 Fitness 2 : un rameur d’intérieur
qui vous transporte
82 Gaming : les jeux de survie
peuvent-ils nous préparer aux
dangers de l’aventure outdoor ?
84 Minimalisme : si vous suivez
leurs conseils, vous ne garderez
pas ce magazine longtemps…
86 Agenda : sur Red Bull TV ou
dans la vraie vie, ce qu’il ne faut
pas manquer
88 Matos : prêt(e) à bouger à moto ?
96 Ils et elles font The Red Bulletin
97 Photo finale : chute dans le Sud
THE RED BULLETIN 7
LOS ANGELES, USA
Part de rêve
Bluffant, comment le pionnier du freeride
russe Pavel Alekhin s’affranchit des lois de
la physique pour atteindre des sommets, et
les nuages. Évidemment, la photo est arrangée.
Cette image est l’œuvre du photographe
et prodige de Photoshop Denis Klero, aussi
compatriote de Pavel. « Je voulais transposer
le vrai saut de Pavel, exécuté à Los Angeles,
dans un environnement artificiel mais féerique,
explique Klero. Car le talent de Pavel
flirte avec les sommets. »
Plus de photos de rêve : klero.ru
DENIS KLERO/RED BULL CONTENT POOL
9
LANDMANNALAUGAR,
ISLANDE
Beauté en
extinction
« L’histoire est toujours la même, affirme
Chris Burkard. Un paysage magnifique
menacé de disparaître. » À bord d’un
Cessna, le photographe californien
survole le cours des rivières glaciaires
d’Islande serpentant les Highlands telles
les racines d’une gigantesque plante.
Le Piper-Cub jaune (volant 300 m plus
bas) semble n’être qu’un simple puceron.
Retrouvez l’ensemble du projet dans le
livre de Burkard : At Glacier’s End.
chrisburkard.com
GOLFE DE FINLANDE
Tour de
contrôle
Les phares sont plus divertissants
qu’ils n’y paraissent. Le photographe
Victor Sukhorukov le
prouve. Le Russe a dû surmonter
deux obstacles : un épais brouillard
et un drone capricieux pour filmer
le BASE jumper Semjon Lazarev
parti du haut des quarante mètres
de ce phare situé en Russie, près
de Saint-Pétersbourg.
tankizt.com
CHRIS BURKARD, VICTOR SUKHORUKOV/RED BULL ILLUME DAVYDD CHONG
11
RAUNHEIM, ALLEMAGNE
J’ai vu de
la lumière...
Au volant de sa voiture, le photographe Robert
Garo est passé maintes fois devant ce spot situé
sur l’autoroute A3 au sud-ouest de Francfort
sans jamais y prêter attention. Il finit par le remarquer
un jour d’embouteillage. Il y revient de
nuit pour examiner la structure de près. Celle-ci
est, à sa grande joie, illuminée. Un décor idéal
pour mettre en valeur le skateur Milan Hruška.
Et une chance unique de briller lors du Red Bull
Illume, le plus grand concours de photographie
pour les sports d’aventure et d’action au monde.
Plus de photos sur : robertgaro.net
ROBERT GARO/RED BULL ILLUME
13
SKATE DURABLE
Mets la gomme
Deux étudiants en design rendent les villes plus propres
avec des roues de skateboard mentholées.
Les adeptes des sports de
glisse sont soucieux de préserver
leurs terrains de jeu. Pour
le surfeur ou le snowboardeur,
un spot abîmé est une source
de plaisir gâché. Aussi, lorsque
Hugo Maupetit et Vivian
Fischer, deux étudiants nantais
en design de 23 ans, réfléchissaient
à un nouveau moyen de
rendre les rues de la ville plus
propres, la communauté des
skateurs est apparue comme
une évidence. Leur projet ?
Récupérer les chewing-gums
usés pour les transformer en
roues de skate.
Contrairement à la rumeur,
un chewing-gum avalé ne reste
pas éternellement dans votre
estomac, votre corps l’expulsera.
Mais sur le trottoir, il y restera
longtemps à cause des
matières plastiques qu’il recèle :
polyéthylène (utilisé dans la
fabrication des sacs plastiques)
et caoutchouc butyle (utilisé
dans les pneus).
Étonné ? Rassurez-vous,
vous n’êtes pas seul. Une étude
réalisée en 2018 par Iceland,
une chaîne de supermarchés
britannique, révèle que 85 %
des personnes interrogées
l’ignoraient. Pire encore, plus
de 80 % des milliards de
chewing-gums mâchés chaque
année atterrissent sur un
trottoir. « Les rues de Nantes
sont parsemées de taches
blanches, explique Maupetit.
Les skateurs constituent une
Adhésion durable : une plaque à chewing-gums.
communauté très sensible à la
protection de l’environnement,
et recycler des chewing-gums
nous a semblé être une excellente
initiative. Le chewinggum
évoque pour nous la souplesse
que requièrent les
roues de skate dont l’usure
est rapide. »
Maupetit et Fischer ont installé
des plaques de collecte
près des skate parks et des
points de ralliement locaux,
invitant les skateurs à y coller
leurs chewing-gums. Les
plaques sont ensuite envoyées
dans une usine où elles sont
broyées avec le chewing-gum.
Le polyméthacrylate de
méthyle, qui compose la
plaque, stabilise la texture.
Celle-ci est mélangée à un
matériau non révélé par Maupetit,
avant d’être moulée par
injection puis usinée. Ainsi,
une roue recycle entre dix et
trente chewing-gums en fonction
de la dureté souhaitée.
Le projet est, pour l’heure
en phase, d’expérimentation.
Maupetit et Fischer espèrent
y associer des marques susceptibles
d’offrir plus de
débouchés à leur initiative.
Ils ont sollicité le fabricant de
chewing-gum Mentos et la
célèbre marque Vans, qui
n’ont pas donné suite à ce jour.
« Mentos est intéressé, mais
Vans n’a pas encore réagi,
confie Maupetit. Les marques
gagneraient à développer des
projets en faveur de l’environnement,
mais ne le font souvent
que sous la contrainte. »
Maupetit fait également
état de réticences de la part
de l’autorité locale, pourtant
principale bénéficiaire du projet.
« Nous avons arrêté l’installation
de nouvelles plaques,
la ville ne nous a pas délivré
d’autorisation pour les emplacements
ciblés. Mais cela
devrait changer prochainement.
Il en va de l’intérêt de
tous. Nantes pourrait ainsi
réduire ses coûts d’entretien
des espaces publics. »
Instagram : @hugo_maupetit ;
@vivian_fischer_
HUGO MAUPETIT, VIVIAN FISCHER LOU BOYD
14 THE RED BULLETIN
THIS IS ENGINEERING/ROYAL ACADEMY OF ENGINEERING LOU BOYD
ROCKET WOMEN
L’espace
universel
Enfant, Vinita Marwaha Madill rêvait de devenir
astronaute. Aujourd’hui, elle encourage les
ambitions des générations futures.
En 1993, Vinita Marwaha
Madill a six ans. Dans la
bibliothèque du coin, elle
découvre un livre sur l’espace
avec, sur l’une des pages, la
photo d’Helen Sharman, première
femme astronaute britannique
et première femme
d’Europe occidentale à aller
dans l’espace. « J’ignorais
alors l’existence d’une astronaute
britannique, explique la
femme de 34 ans, native de
Londres. Le fait de voir à un
jeune âge cette photo a été
un déclic, réaliser mes rêves
devenait soudain possible. »
Cette découverte incite
Marwaha Madill à s’engager
Marwaha Madill a conçu des combinaisons
pour l’espace et rédigé des
procédures pour les astronautes.
dans un parcours qui la mène à
l’Université internationale de
l’espace en France, à un emploi
d’ingénieure des opérations
spatiales au sein de l’Agence
spatiale européenne (ESA) ;
aujourd’hui, elle est chef de
projet pour la société d’exploration
spatiale et de robotique
Mission Control Space Services
à Ottawa (Canada).
Désireuse d’encourager
d’autres jeunes femmes à
entrer dans l’industrie spatiale
et à rejoindre le programme
STIM (sciences, technologies,
ingénierie et mathématiques)
de la NASA, elle fonde en 2012
Rocket Women, une plateforme
mondiale qui relate des
parcours de femmes remarquables
dans les domaines de
l’espace, les sciences et l’ingénierie.
Récemment, le site a
mis à l’honneur Dr Chiara Manfletti,
responsable des stratégies
de l’ESA, et feue Katherine
Johnson, mathématicienne de
la NASA et pionnière afro-américaine
dont les calculs ont été
essentiels à de nombreuses
missions spatiales, notamment
l’alunissage historique
d’Apollo 11 en juillet 1969.
« J’ai également été inspirée
par Sally Ride, la première Américaine
à aller dans l’espace,
confie Marwaha Madill. “On ne
peut pas être ce qu’on ignore’’,
disait-elle. Rien n’est plus vrai. »
En plus d’être un réseau permettant
aux étudiantes en
STIM de rencontrer des professionnelles,
Rocket Women propose
une ligne de vêtements
dont les revenus assurent une
bourse d’études à de jeunes
étudiantes à l’Université internationale
de l’espace — une
étape cruciale dans le parcours
professionnel de Marwaha
Madill. « Je n’aurais pas pu étudier
à l’ISU sans cette bourse »,
insiste-t-elle. Anglaise originaire
d’Inde, Marwaha Madill estime
nécessaire de promouvoir la
diversité dans le domaine des
sciences et de l’ingénierie, une
diversité de genre, mais aussi
d’origine sociale et ethnique.
« Au Royaume-Uni, environ 12 %
des professionnels de l’ingénierie
sont des femmes, et moins
de 9 % sont issues de minorités
ethniques. Statistiquement,
une étudiante en ingénierie ou
en STIM a de fortes chances
d’être l’unique femme dans une
salle de cours, d’où la nécessité
d’une communauté qui vous
soutient… L’ingénierie et les
STIM doivent refléter la société,
on ne le dira jamais assez, car
les systèmes que nous concevons
se destinent à tous. »
rocket-women.com
THE RED BULLETIN 15
Karishma Ali
Droit au but
La star du foot pakistanais parle de ses victoires, de sa lutte
pour l’égalité des sexes et de son combat contre les haters.
Texte ALEXANDRA ZAGALSKY
Photo ABUZAR MIR
beaucoup plus important que prévu.
Elles m’ont montré qu’elles étaient
prêtes à se battre pour leurs droits,
et que je pouvais les aider. Au lieu
d’inviter leurs pères et leurs frères à
assister aux tournois, j’ai convié leurs
mères, qui ont rarement l’occasion
d’assister à de tels événements.
En 2016, Karishma Ali établit un
record à double lecture. Choisie pour
représenter le Pakistan aux Jubilee
Games à Dubaï, la pépite du football,
alors âgée de 19 ans, devient la première
fille de sa ville natale, Chitral,
à participer à un grand tournoi sportif.
Dès l’âge de neuf ans, Ali se passionne
pour le football. Ses années
de lycée à Islamabad, ville plus
ouverte à l’éducation physique des
filles, donnent un coup de pouce à
sa carrière sportive. Elle décroche
une médaille d’argent à Dubaï, et
rentre chez elle avec l’envie d’inciter
les femmes au sport. Pour ce faire,
Ali organise un stage de football
pour lequel elle s’attend à un intérêt
très limité : à sa grande surprise, plus
de cinquante filles s’y inscrivent.
Mais ce succès s’accompagne d’un
revers. Le district de Chitral – région
montagneuse isolée du nord du
Pakistan – est particulièrement
conservateur et patriarcal. Ali est
l’objet d’abus et menaces en ligne.
« Difficile d’être imperméable à la
haine et aux critiques quand on a
18 ans, se souvient-elle aujourd’hui
à 24 ans. Je m’endormais en pleurs. »
Loin de se décourager, la jeune
femme fonde en 2018 le Chitral
Women’s Sports Club, qui propose
aux filles de pratiquer le foot, le volley-ball,
le cricket et même le ski. Le
club compte actuellement plus de
200 licenciées âgées de 8 à 16 ans.
En janvier 2020, elle organise un
stage de football à Islamabad : 37
membres du club y participent, encadrées
par des pros. « Les grands
immeubles, les femmes au volant,
tout cela les a impressionnées,
confie-t-elle. Leur assurance sur le
terrain était belle à voir. »
Quant au club de Karishma, le
Highlanders FC, il a participé cette
année au championnat national
féminin en atteignant les quarts de
finale, avant que la compétition ne
soit annulée après qu’un conflit politique
pousse la FIFA à suspendre,
au printemps dernier, la délégation
pakistanaise de football. Mais la
jeune femme, qui a intégré le 30
Under 30 Asia, classement Forbes
des jeunes entrepreneurs en 2019,
ne recule jamais. Outre son académie
de sport, elle dirige à Chitral
un centre d’artisanat pour femmes,
associé à des créateurs de mode et
qui génère ses propres revenus.
Désormais diplômée en gestion
des affaires à l’université de Londres
d’Islamabad, Ali ambitionne d’améliorer
les infrastructures sportives
de Chitral et de sa région. « Je veux
construire un stade pour les filles et
implanter des clubs dans toutes les
vallées. Le foot est bien plus qu’un
sport, c’est un levier de changement
positif pour les communautés. »
the red bulletin : Jouer au football
n’est pas une mince affaire
pour les filles de Chitral…
karishma ali : Je le dois beaucoup
à mon père. J’ai regardé la Coupe
du monde 2006 à ses côtés. J’allais
dehors et tapais dans tout ce que je
pouvais. Mon père est très libéral
et m’a encouragée à me lancer. Il a
contribué à fonder la première école
anglophone de Chitral en 2002. Les
parents désireux d’y envoyer leurs
fils devaient aussi y inscrire leurs
filles. Mon jeu s’est beaucoup amélioré
au lycée. Je tapais dans le ballon
en Salwar kameez (l’uniforme
traditionnel pakistanais, ndlr) avant
les cours. Je me moquais d’être en
sueur ou pas « jolie ».
Vous attendiez-vous au succès dès
votre premier stage ?
Je n’avais que vingt formulaires
d’inscription, mais les filles les ont
photocopiés, le groupe a fini par être
Comment le stage d’été s’est-il
transformé en club permanent ?
Les joueuses dont je m’occupe
viennent de quarante villages différents.
Même avec un terrain attitré,
de nombreuses filles marchaient
jusqu’à deux heures pour s’y rendre.
Depuis 2019, la subvention Made to
Play (octroyée par Nike et Gurls Talk,
une association pour la promotion du
bien-être psychique des jeunes femmes,
ndlr), nous permet de louer des
Jeeps pour le transport. C’est ainsi
que le nombre d’adhérentes a doublé.
Chitral possède le taux de suicide le
plus élevé du Pakistan, et un grand
nombre de ces suicides concerne les
jeunes femmes. Beaucoup sont issues
de milieux défavorisés. Le football
leur offre une nouvelle perspective.
Il les éduque et les unifie. Le club est
né du bonheur de jouer.
Vos actions vous ont valu de figurer
sur la liste Forbes 30 Under 30
Asia…
Figurer parmi des leaders exemplaires
est une grande fierté. J’ai tout
de suite appelé mon père, qui n’a pu
retenir ses larmes. On me prenait
pour folle parce que je croyais en mes
rêves, mais en devenant la première
Chitrali à figurer dans Forbes, j’ai fait
la une des journaux pakistanais. Cela
a changé la perception que suscitent
les sportives.
Toute cette activité a néanmoins
fini par vous attirer des trolls…
À l’époque, cette haine m’a poussée
à m’éloigner des réseaux sociaux
pendant deux mois, j’étais secouée.
Les insultes n’ont pas cessé, surtout
après les qualifications d’Islamabad
pour le championnat national féminin,
mais vous savez, je n’ai pas
reculé à 19 ans, alors aujourd’hui
encore moins. Nul ne se mettra en
travers de ma route. Je suis en feu.
Twitter : @karishmaAli22
16 THE RED BULLETIN
« Je tapais
dans le ballon
avant les
cours. Je me
moquais de
ne pas être
“jolie”. »
THE RED BULLETIN 17
Mon Vanhattan :
un cocktail sur le
toit quand vous ne
conduisez pas —
pensez au frein
à main.
NISSAN OFFICE POD
Un business
qui roule
Voyage d’affaires ou voyage à faire,
en camping-car, ça roule.
Jusqu’à présent, si vous vouliez
partir à la découverte du
monde sans contrainte, vous
deviez épargner et souvent
démissionner. Mais la pandémie
de l’an dernier a changé
la donne. Le télétravail et les
réunions en ligne ont banalisé
le travail à distance. Une évolution
qui a incité le constructeur
automobile japonais
Nissan à concevoir un camping-car
d’un genre nouveau
intégrant un espace bureau.
Une manière d’allier vie nomade
et vie professionnelle
classique.
Le bureau rétractable via
une application mobile, peut
accueillir une personne, un bureau,
un écran grand format
et une chaise ergonomique du
célèbre fabricant de meubles
américain Herman Miller. Le
sol transparent vous rappelle
entre deux courriels que vous
êtes sur un sentier de montagne
ou au bord d’une plage.
Après l’effort, place au
réconfort : l’appli range le bureau,
le moment est propice
à une randonnée ou à une
séance de surf. À votre retour,
la lampe UV antibactérienne
placée dans la boîte à gants
désinfecte vos effets personnels.
Le toit du véhicule tient
lieu de terrasse avec chaise
longue et parasol, idéal pour
l’apéro. Selon une étude
menée en 2018 par MBO
Partners, une société de solutions
high-tech, 4,8 millions
d’Américains se considéraient
comme des « nomades numériques
», un nombre en forte
augmentation. « Le travail à la
maison pose divers problèmes
à beaucoup d’employés, explique
Nissan à propos de son
concept. En élargissant leur
choix quant au lieu et à la
manière de travailler, nous
les aidons à surmonter ce
problème. »
Présenté cette année lors
de l’édition virtuelle du salon
de l’automobile de Tokyo,
l’Office Pod est encore au
stade de concept qui, toutefois,
s’appuie sur une version
modifiée du fourgon ultracompact
NV350, le projet est
donc pris au sérieux en interne.
« C’est le début d’une
nouvelle ère où concevoir nos
propres modes de vie devient
possible, estime le constructeur
automobile, et où notre
lieu de travail correspond à
notre idéal. »
nissan.fr
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18 THE RED BULLETIN
RED BULL AU
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Robby Naish
Toujours à l’eau
À 58 ans, le plus grand windsurfeur de tous les temps
surfe comme à son habitude et n’est pas prêt à raccrocher.
Texte JÜRGEN SCHMIEDER
Robby Naish naît en 1963 à La Jolla,
en Californie, cinq ans avant que le
premier brevet de la planche à voile
ne soit déposé. En 1976, il devient
champion du monde de la discipline
à seulement 13 ans. Il raflera ce titre
24 fois durant les deux décennies suivantes.
« À aucun moment, je me dis
que je peux en faire mon métier,
confie Naish. L’idée d’une carrière ou
me projeter dans l’avenir ne m’effleure
même pas. Je vis l’aventure
sans me poser de questions. »
Plus de quatre décennies plus tard,
l’aventure dure encore. À 58 ans, Naish
remue toujours sa planche et son
sport, une légende et l’incarnation
vivante de l’évolution des sports nautiques
à travers le monde. En 1968, le
père de Naish, un surfeur passionné,
installe la famille à Hawaï. Robby a
cinq ans. Aujourd’hui, il y vit encore,
mais le paysage autour de lui a bien
évolué, au surf et à la planche à voile
s’ajoute entre autres le kitesurf, le
paddle (SUP), le surf foil. Au milieu
des années 90, il lance sa propre
entreprise, Naish Sails, et crée des
équipements innovants pour ces
sports émergents. « C’est venu naturellement
sans calcul préalable.
Planche à voile, waveboard, planche
de slalom, kite, foil à aile gonflable,
longboard ou SUP, sont des variantes
auxquelles je me suis adapté parce
que j’en avais les compétences et les
moyens. »
En 2016, Joe Berlinger, réalisateur
en 2004 du rockumentaire Metallica:
Some Kind of Monster, contacte Naish
pour un film sur les plus grandes
vagues au monde. Un peu avant le
début du projet, Naish se fracture le
bassin lors d’une figure aérienne mal
négociée et met sa vie en danger.
Le film, sorti cette année, est le poignant
témoignage d’un athlète face
à une onde d’un autre genre, celle
de sa propre mort.
Rétabli, Naish a depuis vieilli et
s’est assagi, mais son optimisme n’a
pas pris une ride. « Mon dernier titre
mondial date de plusieurs décennies,
mais ne comptez pas sur moi pour
ruminer le passé. Je suis aussi actif
qu’il y a trente ans, et heureux d’être
ce vieil athlète qui prend de l’ibuprofène
au réveil, améliore sa technique
ou développe de nouveaux sports
pour inciter les plus jeunes à sortir
et à s’amuser. »
the red bulletin : L’ibuprofène
n’explique pas tout. Comment
entretenez-vous votre forme en
dehors de l’eau ?
robby naish : Mes pairs s’étirent,
font une demi-heure de yoga par
jour. Je déteste le yoga et m’étire peu.
Pour moi, plus c’est raide, plus c’est
fort. Il en va ainsi depuis mes 20 ans.
N’importe quel entraîneur trouverait
cela insensé. Les chutes dans l’eau
ont peu d’impact ce qui n’empêche
pas l’usure des articulations à un
rythme certes bien plus lent qu’avec
des blessures à répétition aux
genoux, aux coudes et aux épaules.
J’essaie d’aller sur l’eau tous les jours,
car avec l’âge, l’inactivité se paie cher.
La blessure reste le principal ennemi.
J’ai travaillé dur pour me remettre de
mes récentes fractures (en 2016, et
une autre au pied droit en 2017, ndlr).
À Hawaï, le fait de pouvoir surfer
toute l’année aide aussi.
Racontez-nous cette blessure…
J’ai cru sur le coup que mon dos était
brisé. La chute n’est pas violente,
mais j’atterris mal, je serais incapable
de la refaire même en essayant des
centaines de fois. Le pied à l’arrière
sort du strap et s’enfonce dans l’eau
derrière moi tandis que la planche
emporte le pied resté calé dans
l’autre strap. L’aile se déplace à vive
allure et je n’arrive pas à basculer
le poids du corps vers l’avant. Je
sens un craquement dans le dos en
tombant à l’eau. Je remue les jambes
pour vérifier si elles répondent et
c’est le cas. Je conclus à un déchirement
de ligament. Je me traîne
sous le vent jusqu’à la plage où ma
mine inquiète visiblement. L’instant
d’après, je suis sur une civière à l’hôpital,
puis dans un avion médicalisé
pour Honolulu. Je venais de vivre
ma première blessure grave, une
expérience instructive, mais très
désagréable.
Certains disent qu’un athlète
meurt deux fois : à la fin de sa carrière,
puis à la fin de sa vie. Vous
n’avez toujours pas rencontré
votre première mort…
Cette affirmation est très vraie. La
plupart des athlètes tournent non
sans peine la page après quelques
années de carrière. Un passage difficile
à vivre lorsque ce qui a le plus
compté pour vous s’arrête soudainement.
J’ai progressivement quitté la
compétition, mais sans prendre ma
retraite sportive. La compétition a
toujours été secondaire, du coup ma
vie a peu changé ; je participais à six
ou sept compétitions par an sans courir
après les points, tandis que le reste
prenait plus de place. Conception,
voyages promotionnels, vidéos, des
journées bien remplies. De plus, mon
éventail de sports s’est étoffé : kite,
paddle, et plus récemment le foil et
le wingsurf. J’ai plus de choses à faire
que de temps pour les accomplir.
CRAIG KOLESKY / RED BULL CONTENT POOL
20 THE RED BULLETIN
« Le plus
bruyant est
rarement le
plus brillant. »
THE RED BULLETIN 21
Robby Naish
Le rêve d’un ado : en 1976, Naish, 16 ans, sur la plage du Diamond Head on Oahu, Hawaï.
Cela peut être préjudiciable à un
sport comme le windsurf ?
Je ne me fais pas de souci pour le
sport, mais cela change la donne. Le
lien spontané avec la nature disparaît.
Avant, on sautait dans un avion
sans savoir quelle météo on aurait à
destination. Maintenant, vous savez
à l’avance quelle houle il y aura aux
Fidji dans deux jours. Je vois beaucoup
de jeunes doués en surf, et ils
semblent s’amuser tout autant que
nous à leur âge. Mais une fois rentrés
chez eux, ils s’empressent de poster
leurs figures au lieu d’apprécier l’instant
et de se réjouir à l’idée de renouveler
l’expérience.
À quel moment vous êtes-vous dit :
« Je peux vivre de cette passion » ?
Ma première compétition de planche
à voile remonte à 1981, j’étais en
classe de terminale. Mon dilemme
était le suivant : soit je passais pro,
soit je restais amateur pour espérer
partir aux Jeux olympiques (en 1984,
la planche à voile intègre les disciplines
pour la première fois, ndlr).
À l’époque, si un athlète perçoit le
moindre dollar, il passe pro de facto
et donc exclu des Jeux réservés
aux seuls amateurs. J’ai fait don
de mes deux premiers gains à mon
lycée. C’est à ce moment que cette
possibilité s’est concrétisée. J’ai été
admis à l’université de Santa Cruz,
en Californie et des sponsors proposaient
de me payer pour faire de la
planche à voile. J’ai repoussé d’un an
mes études pour tenter l’aventure. Je
n’ai pas fait marche arrière depuis.
Nombre d’athlètes au succès
précoce se sont brûlé les ailes.
Pas vous. Pourquoi ?
Cela tient à la chance, au fait de faire
partie des pionniers. Ma personnalité
a joué aussi : j’étais solitaire,
peu sociable et égocentrique. Je
fréquente peu de monde et ne sors
« Les regrets
empoisonnent
la vie. Ma vie,
je l’aime. »
quasi jamais avec des amis ; je suis
un peu bizarre. J’ai ainsi évité les
distractions susceptibles de déconcentrer
un athlète. La lassitude peut
parfois entamer la motivation chez
certains. Je ne suis pas mû par des
objectifs, je ne m’en suis d’ailleurs
jamais fixé. Si l’objectif prend le pas
sur le plaisir, l’envie de réussir finit
par vous quitter. J’aime tout bonnement
ce que je fais.
Vous dites être peu sociable dans
un monde pourtant dominé par les
réseaux sociaux aujourd’hui…
Ils permettent à chacun de se mettre
en valeur et de se faire connaître
sans l’aide d’un agent ou d’un photographe.
Ça, c’est le côté positif.
En revanche, il s’agit moins de devenir
meilleur que d’obtenir des likes et
un million de vues. L’auto- promotion
des athlètes n’a rien de nouveau,
mais ce n’est pas très valorisant —
c’est à celui qui sera le plus bruyant
et en général c’est rarement le plus
brillant. Je déteste les réseaux, mais
impossible d’y échapper.
Avez-vous des regrets au regard de
votre parcours ?
Non, les regrets empoisonnent la vie
et moi j’aime ma vie. Elle n’est pas
parfaite, mais j’ai une sacrée chance
d’être aujourd’hui qui je suis, comme
je suis. D’avoir la liberté de faire ce
que je veux, sans prendre pour acquis
les gens qui financent ma passion.
Cela peut s’arrêter à tout moment –
l’avenir d’un sportif professionnel est
des plus précaires. Alors je savoure
ma vie comme il se doit.
En quête de la vague
la plus longue
Un documentaire accompagne
Naish dans sa dernière aventure.
De la Namibie au Pérou en passant par le
Costa Rica, Robby Naish a passé trois ans
à sillonner le monde, chevauchant les
plus grosses vagues sur son stand-up
paddle. Accompagné du cinéaste Joe
Berlinger, nommé aux Oscars, le surfeur
découvre un nouveau sport, mais aussi
une partie de lui-même. Cette aventure,
probablement la plus émouvante de la
carrière de Naish, est le sujet du documentaire
The Longest Wave.
Disponible sur Red Bull TV dès le 10 août ;
infos : redbull.com
THE LONGEST WAVE
22 THE RED BULLETIN
MODÈLE SPEED LIGHT GREY
L UNETTES DE SOLEIL
SPORTS DE VITESSE
La vague de verre, décembre 2015
« Nous sommes sur la côte nord de Tahiti, avec
des houles venant d’Hawaï, voire de plus loin.
Une vague, un shorebreak, se forme juste au
bord de la plage de sable noir, et en le remuant,
cela crée toute cette variété de couleurs. Ici,
c’est le lever du soleil, avec une falaise derrière,
ce qui donne un côté très sombre. Les premiers
rayons du soleil passent par-dessus la falaise
et éclairent cette lèvre d’eau, donnant un fort
contraste, comme s’il s’agissait de verre ou de
dentelle. Je suis au bord de la plage et il ne faut
pas se faire attraper par la vague, car ça peut
faire mal. J’ai déjà perdu mon appareil photo
et mes palmes dans de telles circonstances.
On est comme démembré par l’impact de la
lèvre sur le sable. »
24
MER
FORTE
Le photographe BEN THOUARD
capture des images des tubes
implacables de Tahiti, et de ceux
qui sont assez téméraires pour les
chevaucher. Une passion pour les
vagues devenue fascination.
Texte PH CAMY
Ben Thouard
Sortie de secours, août 2017
« Avec le surfeur australien Adrian Buchan sous la fameuse vague de Teahupo’o
(considérée comme l’une des plus dangereuses au monde en raison de sa taille
et de sa puissance, et parce qu’elle déferle sur un récif corallien acéré. Le nom
du site de Teahupo’o vient du polynésien, et signifie « le mur de crânes », ndlr).
Ici, à plusieurs centaines de mètres au large, les vagues roulent sur un récif
corallien dépourvu de sable et de particules, et nous avons des conditions
exceptionnelles, une clarté extraordinaire. On voit que la vague ne s’ouvre pas,
qu’elle va s’écraser, alors Adrian décide de s’en sortir en la traversant. J’étais
sur le point de filmer Adrian dans le tube, mais il a surgi à travers la vague
au moment où elle se brisait. C’est ce qui donne cette image inhabituelle :
Adrian debout sur sa planche, mais sous l’eau. »
26 THE RED BULLETIN
THE RED BULLETIN 27
Ben Thouard
En aveugle, avril 2016
« J’aime les clichés engagés, au plus près de
l’action. Ici, avec le surfeur français William Aliotti
à Teahupo’o, je suis juste sous le rebord d’une
vague sur le point de s’écraser sur le boîtier étanche
de mon appareil photo. Je suis déjà complètement
sous l’eau, commençant mon plongeon pour échapper
à l’impact, mais mon bras est encore hors de
l’eau pour shooter. Et puis – hop ! – je tire mon bras
sous l’eau. Je dois passer sous la surface pour éviter
d’être projeté. Je shoote en aveugle et je joue
avec le risque, avant que tout n’explose. »
28 THE RED BULLETIN
Chasseur de slabs, avril 2020
« En plus de mon travail de photographe de surf,
je me suis intéressé à des endroits qui ne sont
pas forcément des spots de surf, où les vagues
prennent des formes incroyables. Ici, non loin
de Teahupo’o, se trouve un surplomb de récifs
où les vagues se brisent en tubes. Je suis dans
l’eau avec un objectif de 300 mm (un téléobjectif,
ndlr), ce qui n’est pas courant pour
photographier à la nage, mais qui me permet
de me concentrer sur cette courbe, ce détail.
J’adore la texture de la surface, et cette courbe
gigantesque et majestueuse, de 4 à 5 m de haut.
Ce genre de forme atypique a un nom : un slab. »
« Je shoote en aveugle
et je joue avec le risque,
avant que tout n’explose. »
THE RED BULLETIN 29
L’attente, mai 2019
« Deux photos prises au même endroit, le même jour : Teahupo’o à 6 heures du matin. La brise matinale arrache
l’écume de la lèvre de la vague, la lumière rasante du lever du soleil illuminant ces projections d’eau volante,
avec ces grandes montagnes en arrière-plan. Sur la photo du haut, les surfeurs attendent, les yeux rivés sur
le large. Sur celle du bas, un surfeur s’est élancé avec une vague, et les autres se positionnent pour la suivante.
Je travaille beaucoup en jet ski, car il me permet d’être très mobile, réactif et, surtout, seul et autonome.
Ici, je suis derrière les vagues, le regard tourné vers le rivage. Cela m’offre un angle complètement opposé. »
30 THE RED BULLETIN
Ben Thouard
« Si tu fais une erreur, l’océan ne pardonne pas »
the red bulletin : Qu’est-ce qui vous a motivé à
plonger votre appareil photo dans l’eau ?
ben thouard : Je suis surfeur depuis tout jeune, mais
je vivais à Toulon, pas la meilleure région pour le surf.
Alors à l’adolescence j’ai commencé à faire de la planche
à voile, puis de la photographie, en faisant un stage avec
Bernard Biancotto, l’un des pionniers de la photo de
windsurf. À 19 ans, j’ai pu aller à Hawaï pour faire des
images de planche à voile. J’avais mon appareil photo et
un boîtier étanche fait maison. Cela m’a conduit à Tahiti
en 2008, et ce fut le coup de foudre. La culture, les gens,
la qualité des vagues, la clarté de l’eau, la lumière changeante
et les différentes atmosphères dans la même
journée… tout était attirant. Je me suis installé ici pour
développer ma photographie de surf. J’avais 22, 23 ans.
À quel moment avez-vous décidé de prendre des
photos de vagues sans surfeurs ?
Environ six ans après mon installation à Tahiti. Il y a eu
une évolution progressive dans mon travail. Cela peut
paraître triste, mais désormais, pour moi, la photo de
surf est davantage un travail ; la photographie de vagues
est devenue une approche personnelle, une rêverie. Je
voulais me libérer des contraintes de la presse ou des
marques qui me passaient des commandes, et montrer
ce qui m’attire dans l’océan, de manière intemporelle.
La tenue, la planche du surfeur datent un
cliché de surf, mais une bonne photo de vague
sera toujours bonne dans vingt ans. J’ai travaillé
dur sur le sujet, photographiant des
vagues dans toutes sortes de conditions, puis
j’ai commencé à vendre des photos en ligne.
J’ai auto-publié mon livre dédié aux vagues,
Surface, en 2018. Cette fin d’année, j’en sortirai
un nouveau, sûrement intitulé Turbulences.
Pourquoi photographier quelque chose
d’aussi insaisissable ?
Ce qui me fascine dans les vagues, c’est de
saisir une image unique, qui peut être
esthétique, graphique ou simplement
belle ; une image qui traduit
la puissance de l’océan : une
forme majestueuse, une explosion,
un vortex qui apparaît
sous l’eau lorsque la vague se
brise. Je trouve fabuleux de
transmettre la beauté de la
nature et de sa force.
Que ressentez-vous dans
les vagues ?
De l’excitation. Et, quand
c’est une grosse vague,
un peu de peur, bien
sûr. Je suis fasciné face
à tant de beauté.
Ce que vous faites exige un haut niveau de forme
physique. Quelle est votre routine côté fitness ?
Je surfe autant que je peux, et j’ai une certaine hygiène
de vie. En outre, je fais des prises de vue plusieurs fois
par semaine et, lorsque les conditions sont bonnes,
je suis dans l’eau trois heures le matin et trois heures le
soir – c’est beaucoup de nage sur place, à attendre avec
mon appareil, pas mal d’apnée aussi. Puis, soudain, une
série de vagues arrive et il faut sprinter, pour échapper à
la vague, ou se placer au bon endroit pour shooter,
avant de plonger – une sorte d’apnée dynamique.
De quel type de matériel avez-vous besoin ?
J’utilise un Canon dans un caisson étanche Aquatech.
C’est un classique des séries professionnelles 1D et 5D,
qui peut prendre des rafales de 15 à 20 images par
seconde avec un autofocus très rapide. J’utilise des
objectifs classiques : fisheye, grand angle, ou autre
lorsque les vagues sont plus grosses. On peut aussi utiliser
un gros téléobjectif qui rentre dans le caisson
étanche. J’ai à peu près 5 kilos de matériel en main.
Comment manipulez-vous tout cela ?
Avec une poignée façon fusil à harpon, ça me sert par
exemple pour saisir les derniers instants d’une action
avec le bras hors de l’eau. J’ai aussi des hublots interchangeables
sur le boîtier étanche pour changer
d’objectif, et des boutons pour régler la caméra
et actionner l’obturateur – je photographie
manuellement. Le tout attaché à mon
bras avec un leash comme celui à la cheville
du surfeur. Tu dois nager, te positionner,
cadrer et faire la mise au point,
et lorsque le surfeur se jette dans la vague
à Mach 12, ne pas le rater. Et si tu fais une
erreur, l’océan ne pardonne pas.
C’est-à-dire ?
Je me suis retrouvé projeté sur le récif
comme si j’étais plaqué à un sol
recouvert de lames de rasoir.
Ça peut arracher tes palmes,
ou bien ton leash te projette
l’appareil au visage. Le but est
d’être au cœur de l’action
sans être enfermé dans la
vague, et d’avoir toujours
une solution de sortie.
Ça n’est jamais lassant ?
Je suis à l’eau depuis plus
de quinze ans, mais je suis
toujours étonné par ce que
j’y vois. C’est toujours en
mouvement et changeant,
ça reste excitant. C’est la
force de la passion.
benthouard.com
THE RED BULLETIN 31
Ben Thouard
Master, mai 2019
« On me demande si j’ai trafiqué
cette photo. Pas du tout, c’est une
lumière complètement naturelle.
Nous sommes une heure avant le
coucher du soleil, avec une montagne
derrière nous, à contre-jour,
avec ce vent offshore qui vient arracher
les embruns de la houle.
Cela crée un jeu de lumière unique :
des gouttelettes d’eau réfléchissant
la lumière et contrastant avec le
fond dans l’ombre. Deux éléments
qui s’affrontent : l’eau et le vent. »
33
Le surfeur inconnu,
mai 2019
« Sous la vague Teahupo’o. Ce jour-là,
l’attente entre les vagues était très longue,
parfois 25 minutes, ce qui m’a offert une
telle clarté d’eau – on peut voir les poissons
et le corail au premier plan. J’ai
tourné toute la matinée pour obtenir deux
ou trois photos, en me plaçant au fond
de l’eau. Il faut anticiper la vague, plonger
au bon moment, se retourner, préparer ses
réglages et son cadrage – tout cela sous
l’eau. On dirait que le surfeur vole, avec
le soleil qui vient frapper le poisson. Cette
image peut être apaisante à regarder,
mais pas à prendre. Et je ne sais toujours
pas qui est ce surfeur. »
34 THE RED BULLETIN
Ben Thouard Surf
Le local,
avril 2015
« Une journée avec des conditions
exceptionnelles : un océan
calme et lisse comme un miroir,
qui nous offre un beau swell de
2, 3 mètres. Et les prouesses
techniques du local, Michel
Bourez, qui se glisse avec aise
sous la lèvre de Teahupo’o ! »
THE RED BULLETIN 35
« Avant cette image,
il y a des années de
photos ratées. »
Ben Thouard
Full speed,
juin 2016
« Matahi Drollet, surnommé le
“Prince de Teahupo’o”, est l’un
des surfeurs les plus doués au
monde. Je l’ai photographié en
utilisant une vitesse d’obturation
plus lente, en attrapant tout ce
qui passe pendant les dixièmes
de seconde où l’obturateur reste
ouvert, ce qui donne ce flou filé.
C’est esthétique mais compliqué,
car il faut avoir quelque chose de
net dans l’image. Il a son regard
fixé sur moi, et sa planche et ses
jambes comme aspirées par
cette machine à laver, ce qui permet
de ressentir la vitesse et la
puissance de la vague. Pour obtenir
une telle photo, il faut de la
chance, mais surtout de la détermination.
J’ai pris des milliers de
photos avant d’obtenir celle-ci –
des années de photos ratées. Je
suis sur un bateau avec d’autres
photographes, tous en train de
photographier la même chose, et
je pense à cette technique en me
disant : “Si tu n’obtiens aucune
photo à la fin, ce n’est pas grave,
mais si tu obtiens quelque chose,
alors ce sera vraiment différent
des autres.” »
Du pur bonheur, avril 2017
« Une photo toute simple, mais un moment magique.
Il doit être 6 heures du matin, je suis parti sous la pluie, et au
moment où j’arrive sur place, il y a cette grande percée de
lumière dans le ciel, avec un grain qui vient de s’évaporer.
Les petits plaisirs de la vie : on se lève tôt, on arrive à l’eau et
on voit ça. La journée commence bien. Du pur bonheur. »
THE RED BULLETIN 37
PASSEZ
AU VERT
Il est l’un des meilleurs ultra-traileurs de
la planète (trois victoires à l’Ultra-Trail du
Mont-Blanc en 2013, 2015, 2018, entre
autres) mais il a cessé de prendre l’avion
pour préserver son terrain de jeu : la nature.
Aucun trophée ne le fera changer d’avis.
Comment suivre ses traces, même si on n’a
pas le même rythme ? Le Jurassien XAVIER
THÉVENARD, 33 ans, parle du déclic nécessaire
pour adopter des comportements
verts simples, et ce qu’il lui a fallu pour
passer des paroles aux actes.
Texte PATRICIA OUDIT
Photos JORDAN MANOUKIAN
Xavier Thévenard, dans la nature où
il s’éclate depuis l’enfance, et où il
est devenu une figure de l’ultra-trail.
38 THE RED BULLETIN
39
Xavier Thévenard
the red bulletin : Xavier, vous venez
de courir la Lavaredo, dans les Dolomites
en Italie, comment vous sentez-vous
pour ce retour aux sentiers ?
xavier thévenard : J’ai abandonné au
33 e kilomètre. Je n’ai pas encore récupéré
de mon Covid, en novembre, j’ai
attrapé une forme très virulente, avec
des gros problèmes de respiration à ne
pas en dormir la nuit. J’ai passé dix jours
au lit, mal, très mal. Au bout d’un mois
et demi, ça allait mieux, mais ce virus,
c’est un peu la roulette russe. Il y a des
moments où ça va à peu près, d’autres
où je souffre d’oppressions au niveau
du thorax. C’est ce qui s’est passé sur
cette course, j’ai eu des sensations
d’étouffements, et toute mon énergie
s’est dégradée. De toutes façons, au
niveau plaisir, c’était zéro, donc ça ne
servait à rien de continuer…
On sait aujourd’hui qu’il existe un lien
entre cette pandémie et la dégradation
des écosystèmes par l’homme. Vous
avez décidé bien avant le Covid de
vous investir pleinement dans la
protection de l’environnement.
Jusqu’à ne plus prendre l’avion…
C’est une décision que j’ai mûrie depuis
des années. L’an passé, je suis allé en
Corse en bateau pour ma tentative de
record du GR 20*. Je n’ai pas fait ça pour
créer le buzz ou la polémique, cela fait
partie de mes engagements depuis tout
jeune. J’ai toujours eu des convictions
écologiques, toujours été un peu militant.
Je me souviens qu’au collège et au
lycée, j’avais déjà des sujets de discussion
sur l’écologie, sur des choses et des actes
qui me révoltaient. Par la suite, j’ai été
influencé par des gens proches des
théories de la décroissance ou de
« On donne
des cours sur
l’écologie à
l’école, c’est
bien, mais il faut
une connexion
physique avec
la nature. »
l’effondrement comme Aurélien Barrau
ou Pablo Servigne, ce sont des personnalités
que je suis sur les réseaux. Ils me
semblent aller dans le bon sens.
*ratée d’une heure et 26 minutes en juillet
2020, battue en juin de cette année par
le Corse Lambert Santelli en 30 heures et
25 minutes, soit 41 minutes de moins que
le record détenu par François D’Haene
depuis 2016.
Aller dans le bon sens, ça commence
par quoi ?
Je ne veux pas donner de leçons, je ne
suis pas un porte-parole, mais je considère
que ça commence par avoir
conscience de ses faits et gestes pour le
bien commun. Aujourd’hui, avec cette
crise sanitaire, on voit qu’on arrive à le
faire : pour le bien commun, on met des
masques, du gel hydroalcoolique, pour
éviter de se mettre en danger les uns les
autres. Pourquoi ne le ferait-on pas pour
l’environnement ? Pourquoi ne pas se
déplacer à pied, à vélo pour aller faire
deux ou trois courses et acheter en vrac
pour éviter les emballages, tout ce plastique
? Il y a 630 000 personnes en
Europe qui décèdent tous les ans des
effets de la pollution, soit 13 % de la
population : sur la durée, ça tue beaucoup
plus que le Covid*. Pourtant, on ne
prend pas la mesure de la catastrophe.
C’est moins immédiat qu’une pandémie,
mais beaucoup plus mortel à terme.
*à titre de comparaison, sur 15 mois,
à compter du 1 er avril 2020 au 30 juin
2021, le Covid a fait 860 000 morts.
Que constatez-vous de ces effets, vous
qui êtes en permanence sur le terrain ?
Il y a le problème des déchets bien sûr,
mais on constate aussi les changements
de comportements parmi la faune, c’est
le cas pour les oiseaux. On voit régulièrement
des moineaux en altitude parce
que les températures augmentent, des
milans noirs qui sont là toute l’année
alors qu’ils partaient migrer en Afrique
pour se mettre au chaud. En montagne,
les orages violents sont de plus en plus
fréquents, en discutant avec les anciens,
c’est flagrant, ils disent ne pas avoir
connu ça. D’un autre côté, quand on
entend les climatosceptiques, on s’aperçoit
qu’ils font plein de raccourcis : par
exemple, cette année, quand on voit les
paquets de neige qui sont tombés, ils en
concluent : le dérèglement climatique
c’est du pipeau ! Sauf que c’est ni plus ni
moins qu’un hiver normal, mais comme
on n’en a pas eu depuis cinq ans, on finit
par penser que c’est exceptionnel. Mais
des – 20 °C dans nos régions, c’est normal
! C’est sur le long terme qu’il faut
analyser le réchauffement, les causes,
les conséquences. Là où je me rassure
un petit peu, c’est que je vois encore
certaines fleurs que je voyais gamin.
Pouvez-vous nous éclairer sur le rapport
bénéfice-contrainte de vos choix ?
Ne plus prendre l’avion, c’est se priver
de compétitions majeures…
Bénéfices ? Que des plus. Et contraintes ?
Franchement, il n’y en a pas tant que ça !
Quand je fais huit heures de route pour
aller courir la Lavaredo dans les Dolomites,
je découvre un univers de fou.
Et quand je vois cette nature-là, magnifique,
je me dis : a-t-on vraiment besoin
d’aller aux États-Unis ? Derrière ta maison,
il y a tellement à faire ! J’ai choisi un
sponsor et des partenaires qui me suivent
dans mes convictions, qui ne m’imposent
pas d’aller à l’autre bout du monde pour
faire des courses. Je ne perds pas mon
énergie dans les aéroports, en plus je
déteste ça, alors pour moi, c’est nickel.
Pour l’anecdote, mon beau-père était
40 THE RED BULLETIN
« Même pour
l’ultra-trail
du siècle, je
resterai fidèle
à mes engagements.
Ou j’irai
à la voile ! »
Sera-t-il à l’heure pour le dîner ? Afin de réduire son empreinte carbone, Xavier peut
enchaîner des dizaines de kilomètres de course rien que pour rendre visite à sa famille.
avec nous en Italie, il n’a jamais pris
l’avion de sa vie, ce n’est pas pour autant
qu’il n’est pas ouvert, pas cultivé, pas
heureux ! On se crée des besoins, comme
absolument aller à l’étranger. Pourquoi
ne pas casser cette symbolique du tout
consommation ?
Comment la casser ?
Pourquoi ne pas faire des lois : au même
titre qu’on n’a pas le droit d’assassiner
son voisin, pourquoi ne pas interdire
les véhicules hyper-polluants qui sont
néfastes pour le bien commun et tuent à
petit feu. Si on va un peu loin, on participe
tous à la destruction des espèces
humaines et animales. Essayons de
ringardiser cette image d’accumulation
de biens de consommation. Dire que
faire son jardin, cultiver ses légumes,
c’est la classe !
Question avocate du diable : on vous
propose l’ultra-trail du siècle à l’autre
bout du globe, vous faites quoi ?
Par rapport à l’avion, je me laisse juste
la possibilité d’une urgence familiale ( les
parents de Xavier vivent en Corse, ndlr),
un problème de santé… Sinon, même
« Je ne suis pas
exemplaire, c’est
impossible de
l’être à partir du
moment où l’on
consomme. »
s’il y a un plateau d’anthologie, je resterai
fidèle à mes engagements. Ou alors,
j’irai à la voile ! Un de mes sponsors,
Julbo, a de bons skippeurs, il y a peutêtre
moyen de goupiller un truc !
Comment réagit la communauté trail
à vos engagements ? Y a-t-il une prise
de conscience ?
Globalement oui de la part des coureurs,
et y compris dans l’organisation des
grandes courses, de plus en plus
propres. Mais il y a encore des comportements
choquants. Sans nommer personne,
quand je vois sur Insta des traileurs
faire les kékés avec leur grosse
BMW, Mercedes ou faire de la moto
trial sur les chemins, je me dis que
l’image véhiculée n’est pas la bonne.
Lorsqu’on pratique un sport comme
le trail, où on est en permanence dans
la nature, on ne peut pas utiliser sa
notoriété à ça.
En termes d’écologie, nul n’est irréprochable.
Quels choix faites-vous
dans votre vie quotidienne pour
consommer moins, mieux ?
Je ne suis pas exemplaire, bien sûr,
c’est impossible de l’être à partir du
moment où l’on consomme. Mais on
peut faire en sorte de se fixer quelques
objectifs faciles à atteindre dans sa vie
de tous les jours. Le problème, c’est
qu’on va forcément se heurter à des
paradoxes, à des méthodes contre-productives.
Par exemple, avec ma copine
qui est architecte, on est en train de
rénover une vieille ferme, avec l’envie
d’en faire une maison autonome, passive,
sans déperdition d’énergie. Il y a
beaucoup de travail en amont sur le
choix et l’utilisation des matériaux, sur
les techniques. Mais pour le terrassement,
on est obligés de faire venir des
pelleteuses, néfastes pour l’environnement…
Ce qui est contradictoire avec
notre projet d’éco-durabilité. Pour faire
du propre aujourd’hui, il faut encore
passer par du sale.
Comment discutez-vous de cette
problématique avec vos sponsors ?
Mon nouvel équipementier, On, veut
bien faire les choses, c’est pour ça que
je me suis engagé avec eux. L’idée est
d’aller vers le 100 % recyclable, ce qui
est déjà le cas avec un modèle de chaussures.
Il y a d’autres démarches en cours
pour limiter le packaging, ce beau
carton… qui va finir à la poubelle.
ON-RUNNING.COM
42 THE RED BULLETIN
Xavier Thévenard
De la même manière, comment un
circuit mondial de trail peut réduire
son empreinte carbone ?
J’avais évoqué l’idée d’un circuit trail
par continent, avec l’idée de rassembler
les meilleurs sur un seul championnat
du monde dans un seul pays. Ce serait
une solution pour limiter les déplacements.
Je pense que ça peut le faire pour
des trails pas trop longs, des 30 ou des
50 km, mais que cela ne fonctionne pas
pour les ultras : dans ce genre de format,
il faut venir avec 100 % de motivation,
avec ses tripes, et on ne peut pas imposer
à un coureur de venir, surtout si c’est à
l’autre bout du monde, dans un désert
ou un spot qui lui déplaira, dans lequel
il aura zéro sensations. L’ultra nécessite
déjà de s’entraîner dans des univers
hostiles, dans la plus extrême difficulté,
si en plus on doit courir 170 bornes
sans prendre aucun plaisir… C’est de
la torture. Il faut que les parcours nous
fassent vibrer, en termes de décor,
d ’atmosphère. Moi, j’ai la chance d’avoir
l’UTMB (Ultra-Trail du Mont-Blanc)
à côté… Mais un Américain va larguer
pas mal de gaz à effet de serre en volant
jusqu’à chez nous.
« J’ai beau être
ultra-traileur,
80 kilomètres
en courant, ça
pique un peu ! »
À propos, connaissez-vous votre
empreinte carbone ? A-t-elle baissé
ces dernières années ?
Très bonne question ! Il faut que je fasse
le point à la fin de l’année. Pour le
moment, on est à sept mois de l’année
2021, et mon plus gros voyage, c’est les
huit heures de voiture que je viens de
faire pour aller en Italie. On peut rajouter
les quelques allers-retours Alpes et
Jura en voiture, mais dès que j’ai pu,
j’y suis allé à vélo, voire à pied. J’ai beau
être ultra-traileur, ça fait quand même
80 kilomètres ! Ça pique un peu. Après,
avec ma copine, on fait un maximum
de co-voiturage.
Parlez-nous de votre engagement
auprès des associations Mountain
Riders et Une Bouteille à la mer, de
vos prises de parole dans les écoles.
Que dites-vous à ces jeunes ?
Ce sont essentiellement des élèves de
primaire et de collège, des publics auxquels
je suis un peu habitué en tant qu’éducateur
sportif. Je préfère montrer que dire, alors
souvent, je les emmène dans la nature.
On fait un peu de plogging (ramassage des
déchets en marchant ou en courant, ndlr)
que je pratique personnellement à chaque
sortie. Je crée des équipes pour rendre le
tout plus ludique, à celles qui ramassent
le plus vite, je leur explique en passant
combien de temps un déchet met à se
dégrader…
Je les amène dans une forêt bien rangée
et bien droite d’épicéas, aménagée par
l’homme et dans une autre zone sauvage
et par la simple observation des sols, ils se
rendent compte que l’empreinte humaine
n’est pas forcément une bonne chose, que
ça appauvrit. Juste à travers une balade,
les sensibiliser à l’environnement, c’est
déjà ça. J’ai des gamins parisiens qui n’ont
jamais vu une vache en vrai et qui s’émerveillent
de tout sur leur chemin… On
devrait fondamentalement revoir notre
rapport à la nature, faire en sorte que dès
le plus jeune âge, on touche la terre de ses
mains : on donne des cours sur l’écologie
à l’école, c’est bien, mais il faut une
connexion physique avec la nature.
Cette nature est votre terrain de jeu
depuis toujours…
J’ai toujours baigné dedans, à faire des
cabanes dans les bois, à soigner le petit
corbeau tombé de son nid et à en faire
un compagnon de jeu, à apprivoiser le
marcassin abandonné et recueilli par ma
mère et qui a fini par s’amuser avec notre
chien. Tout ça m’a ancré dans la terre,
m’a éveillé, émerveillé. Et quand tu es
émerveillé, tu fais tout pour que ça dure,
perdure, que le joyau ne soit pas abîmé.
On ne peut pas se lasser de tout ça.
Tous les mois de juin, l’odeur des foins
me fait retomber en enfance.
Partir du bon pied : pour Xavier, une sortie en forêt ou sur un
sentier peut déclencher une prise de conscience écologique.
À tous les gens qui courent et
marchent dans la nature, où qui souhaitent
s’y aventurer désormais,
qu’avez-vous envie de dire ?
Observez, regardez ! Prendre conscience
de la beauté de la nature, s’imprégner
de tout ça, et se dire qu’on est privilégiés.
Et qu’on va tout faire pour le rester.
Instagram : @xavierthevenard
THE RED BULLETIN 43
Sous les
cicatrices
NAI PALM, chanteuse du groupe australien Hiatus
Kaiyote, a fait face à l’adversité toute sa vie.
Elle révèle ici comment son art et la force de
la nature l’ont aidée à revenir plus forte.
Texte LOU BOYD
Photos TRÉ KOCH
Ils en font des caisses :
(de gauche à droite)
Perrin Moss, Paul Bender,
Simon Mavin et Nai Palm
du groupe Hiatus Kaiyote.
45
Nai Palm
Le
deuxième titre du nouvel album de Hiatus Kaiyote, Mood
Valiant, s’ouvre sur des chants d’oiseaux. Pour la chanteuse
et compositrice du groupe, Nai Palm – de son vrai nom Naomi
Saalfield – il ne pouvait y avoir une toile de fond plus parfaite :
le chant et la compagnie des oiseaux font partie de la vie de
cette Australienne de 32 ans depuis toujours. « Mais ce n’était
pas intentionnel, s’amuse Saalfield lors d’une conversation
Zoom avec The Red Bulletin. Ce n’est pas un choix – on finit toujours
avec les oiseaux. J’étais en train de faire l’enregistrement
d’une piste vocale et ils étaient dehors. Ils avaient l’air vraiment
cool, alors on s’est dit : “Pourquoi ne pas les garder en tant que
touche environnementale ?” »
La relation de Saalfield avec les oiseaux et les animaux
sauvages est bien documentée dans la discographie de Hiatus
Kaiyote : elle a jammé avec un hibou sur le deuxième album
du groupe, Choose Your Weapon (2015), et son perroquet,
aujourd’hui disparu, Charlie Parker – nommé d’après la légende
de jazz – était souvent présent dans le studio lors des séances
d’enregistrement du groupe.
Bien que leur musique soit souvent décrite comme étant de
la « future soul », les musiciens de Hiatus Kaiyote préfèrent parler
d’un « truc gangster multidimensionnel et polyrythmique ».
Un genre qui pourrait passer pour inaccessible mais qui s’avère
être tout le contraire : non seulement des chansons des deux
premiers albums de Hiatus Kaiyote ont été en nomination
aux Grammy Awards (Nakamarra, avec Q-Tip et Breathing
Underwater) mais le groupe a également été validé par des
icônes musicales comme Prince et Erykah Badu en plus
d’être samplé par Beyoncé, Anderson .Paak ou encore Drake.
Naomi Saalfield, en compagnie de Paul Bender (basse),
Simon Mavin (claviers) Perrin Moss (batterie), a passé les dix
dernières années à créer une musique qui examine la relation
entre toutes les composantes de la vie, de la science et l’art à la
nation et à la culture, ainsi qu’entre les humains et le reste du
monde naturel. « Nous essayons de faire une musique qui donne
aux gens une multitude de choses différentes à découvrir, ditelle.
Il y a tellement de détails qu’au fil des années, vous pouvez
toujours trouver quelque chose de nouveau et continuer à avoir
une relation avec les titres. »
« Nous essayons
de faire une musique
qui donne aux gens
une multitude
de choses différentes
à découvrir. »
46 THE RED BULLETIN
« Une femme sur cinq vit avec un cancer du
sein, mais je n’ai jamais vu de femmes avec un
seul sein. Si je ne pouvais pas voir d’exemples,
alors j’allais en devenir un pour les autres. »
48 THE RED BULLETIN
Nai Palm
Bien avant la formation du groupe en 2011, les rencontres
spontanées et oniriques avec des animaux sauvages faisaient
partie intégrante de la vie de Saalfield. Née et élevée à Melbourne,
elle a été contrainte de déménager à la campagne à
l’âge de onze ans après la mort de sa mère des suites d’un cancer
du sein. Puis son père est également décédé peu après dans
l’incendie de sa maison. Ce déménagement dans la petite ville
de Mount Beauty, dans l’État de Victoria, au sud-est de l’Australie,
l’a éloignée de tout ce qu’elle avait connu jusque-là, mais
il a également marqué le début d’une relation importante et
durable avec la faune indigène. « J’ai vécu avec des gardiens
animaliers et nous avions un dingo, un aigle royal et des
wombats », se souvient Saalfield.
Pour s’extraire de cette jeunesse dramatique, elle a commencé
à jouer de la guitare et à passer la plupart de son temps
à l’extérieur, se liant d’amitié avec un chiot dingo qui dormait
près de la maison. « Mon installation dans une vallée alpine très
isolée et le temps passé avec la faune indigène ont été de beaux
moments enrichis de vertus thérapeutiques, dit Saalfield. Les
animaux manifestent vraiment de l’empathie, et j’ai souvent
chanté pour eux. Je pense que le rôle de la musique et celui du
musicien consistent avant tout à rappeler aux gens la magie et
l’émerveillement. Pour moi, la nature est le meilleur exemple
de la véritable magie qui existe dans le monde. »
Sur le visage de la chanteuse, de la lèvre au menton, un
tatouage trace la ligne d’une éraflure causée par un ami animal
– un corbeau orphelin qu’elle a sauvé, élevé et libéré lorsqu’elle
avait quinze ans. Pour Saalfield – elle-même orpheline – la relation
avec le jeune oiseau et l’éraflure qu’il lui a laissée étaient
imprégnées d’une signification plus profonde. « J’ai eu l’impression
que c’était une leçon de ma mère. De la laisser aller tout
en continuant de la porter en moi. »
Ces traumatismes précoces constitueraient un défi plus
que suffisant pour quiconque, mais l’adversité a continué
d’attendre Saalfield au tournant. Il y a trois ans, alors que
Hiatus Kaiyote était en tournée aux États-Unis, on lui a diagnostiqué
un cancer du sein – la même maladie qui a emporté sa
mère. La chanteuse dit que le diagnostic l’a secouée d’une
manière qu’elle n’avait pas connue jusque-là. Publiant la nouvelle
sur Instagram à l’époque, elle a dit à ses fans : « Je suis
rongée d’anxiété tout en essayant de pratiquer le courage et la
patience au quotidien face à la merde la plus effrayante et la
plus angoissante que j’ai jamais eu à endurer. » Saalfield s’est
envolée pour l’Australie où elle a subi une opération chirurgicale
vitale. En 2019, elle a heureusement reçu un verdict de
guérison. Avec le recul, elle considère que la musique a été
l’exutoire par lequel elle a pu traiter et comprendre son
expérience.
Tout en se remettant de la mastectomie qui lui a sauvé la vie,
Saalfield a pris contact avec d’autres personnes atteintes de ce
cancer, et elle a pris publiquement position contre les normes
de beauté qui, selon elle, peuvent pousser les femmes ayant
subi une mastectomie à opter sans réfléchir pour une chirurgie
superficielle. Afficher la beauté de son expérience est quelque
chose qui a toujours semblé naturel chez elle. Ainsi, lorsqu’on
lui a proposé une chirurgie reconstructive du sein après l’opération,
elle a refusé.
« J’ai été très ferme dès le départ sur le fait que je ne voulais
pas de chirurgie reconstructive, explique-t-elle. C’est vraiment
invasif et dangereux– vous introduisez un truc géant en silicone
THE RED BULLETIN 49
Nai Palm
« Soyez fier de vos
cicatrices. Elles sont
fortes et belles. »
dans votre corps. » Bien qu’elle soit convaincue de sa décision,
Saalfield a été choquée par la réaction du corps médical qui
n’a guère fait preuve d’empathie et qui lui a recommandé
un suivi psychiatrique. « Le chirurgien plastique m’a dit :
“Vous risquez de le regretter plus tard et cela vous ferait sentir
à nouveau normale”, dit-elle en secouant la tête. J’étais soufflée.
Je me suis dit : “Qui es-tu pour décider pour moi ce que
je vais regretter ? Je ne serai jamais normale. Cela a changé
ma vie pour toujours.“ »
Au lieu de cela, son torse arbore désormais un tout nouveau
tatouage là où se trouvait autrefois son sein en plus d’une décoration
dorée semblable – modelée sur son sein avant son ablation
– qu’elle prévoit de porter sur ses tenues de scène. « Je ne
serai plus jamais ce que j’étais, mais putain que c’est génial,
dit-elle, soudainement animée. On m’a offert la possibilité de
retourner la situation, tu vois ? Non seulement je ne vais pas
avoir de reconstruction, mais je vais m’afficher avec ça. » Sa
prise de position a suscité des centaines de messages de soutien
et de gratitude de la part de femmes qui vivent une situation
semblable. « Une femme sur cinq vit un cancer du sein et pourtant
je n’ai jamais vu de femmes avec un seul sein dans la vraie
vie. Jamais, pas une seule, dit Saalfield en haussant les épaules.
J’ai décidé que si je ne pouvais pas voir d’exemples, j’allais en
devenir un pour les autres. Montrer aux femmes une autre voie
et montrer qu’elles peuvent encore être dans le coup. Portez
vos cicatrices avec honneur – elles sont fortes et belles. »
Après les épreuves et les tribulations de ces trois dernières
années, le Hiatus Kaiyote de 2021 est-il le même groupe
qu’avant, ou Saalfield pense-t-elle que sa propre expérience
et l’épreuve collective causée par la pandémie ont provoqué
un changement de tonalité ? « Chaque chanson que nous faisons
a son propre petit monde en soi, dit-elle, pensive, mais
l’intention reste la même. » Après tout, il s’agit d’un groupe
dont la musique a tendance à ne pas être tournée vers l’intérieur
mais plutôt vers l’extérieur, vers le monde. Le titre phare
de Hiatus Kaiyote, Nakamarra, sorti en 2012, invitait ses fans
à se documenter au sujet de l’artiste aborigène Doreen Reid
Nakamarra. Get Sun, le premier single de Mood Valiant,
comporte un court extrait du documentaire Corumbiara: They
Shoot Indians, Don’t They ? réalisé par le cinéaste brésilien
Vincent Carelli en 2009.
« Vous pouvez écouter Get Sun et vous dire que c’est amusant,
dit Saalfield, ou vous pouvez aller plus loin et découvrir
que c’est plus que cela. C’est un sujet de discussion et cela
peut pousser les gens à s’informer sur ce qui se passe réellement,
en particulier dans les communautés indigènes. En tant
qu’artiste blanche dans l’œil du public, il est important pour
moi de me concentrer sur des choses qui sont dignes d’amour
et d’attention. »
Cela signifie-t-il que Saalfield considère que sa musique
a une ambition politique plus élevée dans le monde ? Elle
secoue la tête. « Tout ce que je veux, c’est apporter de la
beauté et un sanctuaire, parce que c’est ce que la musique
représente pour moi. Quand j’ai l’impression que le monde
va s’écrouler, la chose qui m’apporte la paix, c’est la musique.
Elle m’a sauvé la vie. Si je peux jouer ce rôle pour quelqu’un
d’autre, alors j’ai l’impression de faire davantage partie de
l’univers et que ma vie a de la valeur. »
Aujourd’hui, Saalfield est en forme, Hiatus Kaiyote a un
nouvel album, le monde s’ouvre à nouveau, et le groupe prévoit
d’entamer sa première tournée depuis 2018 – un nombre
restreint de concerts un peu partout en Australie. La chanteuse
dit que, même si elle est heureuse de pouvoir sortir et
de recommencer à jouer avec le groupe, elle allait s’ennuyer
de la vie plus calme qu’elle a mené ces deux dernières années
qui a inclus l’adoption d’un chaton – « Pas un oiseau cette
fois-ci, dit-elle en riant. Retournement de situation ! » – et la
satisfaction procurée par un espace chez elle dédié à la création
de musique et d’art. Saalfield révèle qu’au cours des
douze derniers mois, elle s’est initiée au kintsugi – l’art japonais
de réparation des objets fissurés ou cassés à l’aide d’une
laque spéciale mélangée à de la poussière d’or ou d’argent,
créant une soudure à la fois visible et esthétique – et a pratiqué
cet art sur ses propres tuyaux cassés et ses vases dans sa
maison.
« Dans la vie, quand on casse quelque chose, souvent on le
jette parce qu’il semble trop difficile d’en faire quelque chose
d’autre, explique-t-elle lorsqu’on lui demande ce qui l’a attirée
vers cet artisanat. Mais avec le kintsugi, vous décidez d’en
faire quelque chose de beau d’une manière nouvelle et différente.
La partie cassée est désormais illuminée. »
hiatuskaiyote.com ;
Instagram : @artykarateparty
50 THE RED BULLETIN
À son tour
de briller
En devenant le plus jeune vainqueur
d’une compétition de F1 à l’âge de
18 ans, MAX VERSTAPPEN est vu
comme l’Élu, voué à régner en maître
sur les championnats du monde.
Et l’année 2021 pourrait être celle
du couronnement du Néerlandais.
L’impétueux pilote qui avait tant de
mal à contenir son impatience affiche
à présent un calme olympien.
Un Max de zen…
Texte JUSTIN HYNES
MARKUS BERGER/RED BULL CONTENT POOL
52
Max Verstappen
D
ans un peu plus de 96 heures, ici à Monaco,
les concurrents s’élanceront pour le plus
glamour des Grands Prix de F1. En raison
des restrictions liées à la crise sanitaire, le terrain
de jeu des stars et de la jet-set sur la Côte d’Azur
n’accueillera pas les fastes habituels qui accompagnent
la plus insolente des démonstrations de
consommation ostentatoire dans le monde des
sports mécaniques. Mais le niveau de la compétition
reste spectaculaire. Pour Max Verstappen,
ce week-end est un tournant décisif : à 23 ans, le
pilote Red Bull Racing est impliqué dans son premier
véritable duel pour la tête du championnat depuis
ses débuts en 2015. Difficile de le croire quand
on l’aperçoit à la marina du port de Fontvieille,
car le Néerlandais dégage une incroyable sérénité.
Retour sur la course qui a libéré le nouveau Max.
En route vers une victoire
éventuelle, six ans après
l’accident spectaculaire qui
a marqué ses premiers pas
dans la compétition à l’âge
de 17 ans, Max Verstappen
est le favori du Grand Prix
de Monaco 2021.
GETTY IMAGES
55
56 THE RED BULLETIN
Max Verstappen
GETTY IMAGES
On ne s’attendrait pas à une telle
sérénité de la part d’un pilote
automobile qui considère habituellement
que tous les coups
sont permis et accorde peu d’importance
à la réputation prestigieuse de ses rivaux.
Dès son arrivée dans le monde de la F1,
Max Verstappen a remporté des courses.
Il a d’ailleurs battu le record du monde
du plus jeune vainqueur à l’âge de
18 ans, ce qui lui a valu le qualificatif
de « futur champion ». Mais il aura fallu
attendre cette année pour que les étoiles
s’alignent et transforment le poids de
cette destinée en possible réalité.
L’an dernier, de nouvelles réglementations
ont bouleversé le monde de la F1.
Après que le fournisseur de pneumatiques
Pirelli a dévoilé ses inquiétudes concernant
les charges aérodynamiques infligées
aux pneus des voitures de F1 les plus
rapides jamais construites, des modifications
ont dû être apportées aux monocoques
afin de réduire drastiquement la
déportance. Mercedes, septuple champion
des constructeurs, et Lewis Hamilton,
son septuple champion du monde,
ont été les plus affectés, car les obscurs
changements affectant les dimensions
du fond plat et les écopes de frein arrière
ont fait perdre aux Flèches d’Argent leur
avantage historique, plaçant Hamilton
à portée de volant.
Pour l’équipe de Max Verstappen,
ce vent de nouveauté a été plus clément.
Totalement repensé, le groupe propulseur
Honda a métamorphosé la Red Bull
Racing RB16 2020 : autrefois capable
de faire monter Max Verstappen sur le
podium, mais rarement à la première
place, cette voiture est devenue une
« La saison va
être longue et
on ne peut pas
se permettre de
faire de grosses
erreurs. »
À gauche : Max Verstappen, contemplatif au port
de Fontvieille (Monaco), quelques jours avant le
début du Grand Prix iconique de la principauté.
concurrente féroce de Mercedes, que ce
soit en termes d’élégance, de puissance ou
de rapidité. Or, si Max Verstappen dispose
désormais d’une arme redoutable pour
renverser le maître incontesté Hamilton,
en ce jour de Grand Prix à Monaco (le
23 mai), le pilote Red Bull se trouve toujours
à 14 points du champion en titre
après les premières courses de la saison.
Dès l’ouverture du championnat à
Bahreïn, Max Verstappen a affiché ses
intentions en s’emparant avec panache
de la pole position. Le rusé Lewis Hamilton
a alors manœuvré pour piéger le
jeune pilote dans un dépassement tardif
un peu approximatif qui a assuré la victoire
au Britannique. Max Verstappen
a riposté pendant la course suivante à
Imola, jouant des coudes dès le départ
avec Lewis Hamilton qui avait cette fois
pris la pole position, ce qui a propulsé le
Néerlandais vers une victoire incontestée
tandis que son rival devait se contenter
de la deuxième place.
Cependant, si cette rencontre éprouvante
a montré que le pilote Red Bull ne
se laisserait pas facilement intimider, les
deux manches suivantes, qui ont eu lieu
au Portugal et en Espagne, ont été de
véritables master class dispensées par
Lewis Hamilton.
De son côté, Max Verstappen n’a eu de
cesse d’accumuler les erreurs mineures :
un léger dérapage au tour 14 sur le circuit
portugais, puis un moment de confusion
lors d’un appel au stand et une roue
avant droite bloquée pendant son out lap
à Barcelone. Ces petits soucis ont suffi
pour apporter la victoire à l’invulnérable
représentant de Mercedes dans la lutte
la plus acharnée qu’ait connue le championnat
de F1 depuis dix ans.
Aujourd’hui, alors qu’il s’apprête
à prendre le départ sur le circuit de
Monaco, le jeune Néerlandais n’attend
qu’une chose : la rédemption. Toutefois,
un problème persiste : Max Verstappen
n’a jamais brillé ici et il n’a jamais pu
accéder au podium. Pour garder Lewis
Hamilton à l’œil et éviter qu’un désagréable
écart de 14 points ne devienne
irrattrapable, Max Verstappen doit puiser
au plus profond de lui-même.
« Monaco, c’est un événement unique,
répond Max Verstappen quand on lui
demande ce qu’il attend du week-end.
La piste est vraiment serrée. Il y a
d’autres circuits urbains, mais rien
d’aussi marqué. On ne peut pas se sentir
plus à l’étroit qu’à Monaco. Surtout
pendant les qualifications, lorsqu’on
THE RED BULLETIN 57
Max Verstappen
Devant le virage : Max Verstappen précède Valtteri Bottas, pilote Mercedes AMG Petronas,
au niveau de la fameuse chicane pendant le premier tour de la course.
repousse toutes les limites. » Mais alors
que la vision des murs qui se rapprochent
dangereusement pouvait autrefois l’inciter
à relâcher l’accélérateur et jouer
son va-tout, Max Verstappen arbore un
comportement différent cette année.
Finies les démonstrations régulières de
son tempérament volcanique. Fini l’entêtement
qui l’a conduit à ignorer sciemment
les drapeaux jaunes dans sa course
vers la pole position au Mexique il y a
deux ans, ou encore son obstination qui
l’a relégué à la quatrième position sur la
grille de départ. Tout cela a laissé place
à un nouvel équilibre et une zénitude
axée sur ce qu’il appelle « choisir le
moment où l’on va briller ».
« Vous devez comprendre que si ce
n’est pas votre jour, il n’y a rien à faire.
Il faut se contenter de ce que l’on a,
explique-t-il. Jusqu’à l’an dernier, nous
savions que nous ne pouvions pas remporter
le championnat. Dans ce type
de situation, vous sautez sur toutes les
occasions pour gagner… au risque de
tout perdre. Enfin pas vraiment, mais
vous franchissez les limites pour tenter
d’obtenir un meilleur résultat.
Aujourd’hui, notre voiture peut clairement
concurrencer Mercedes. C’est plus
qu’un miracle occasionnel. Nous devons
veiller à engranger au moins quelques
points chaque week-end, même si nous
ne réalisons pas la course parfaite. C’est
une approche différente. » Cette vision
des choses paraît à des années-lumière
du Max Verstappen connu pour avoir
menacé de frapper son rival Esteban
Ocon après que le Français l’a percuté
pendant le Grand Prix du Brésil en 2018,
ou pour avoir tout risqué lors d’un dépassement
tardif, brutal et ultraserré de la
Ferrari de Charles Leclerc pour s’assurer
la victoire lors du Grand Prix d’Autriche
de 2019. Pour Max Verstappen version
2021, une seule chose compte : l’âpre
lutte qui l’oppose à Lewis Hamilton.
« Je me retrouve face à un septuple
champion qui ne manque pas d’expérience,
mais je dois tout mettre en œuvre
pour le battre. Quand la victoire n’est
pas envisageable, il faut se contenter du
meilleur résultat possible, car la saison
va être longue et on ne peut pas se
permettre de faire de grosses erreurs,
analyse-t-il. Lewis sait lui aussi parfaitement
choisir ses moments et garder la
tête froide quand ce n’est pas le jour et
qu’il faut tout de même aller chercher
des points. »
Jeudi après-midi. Alors qu’il reste
72 heures avant le début de la
course, la probabilité d’une issue
positive est mise à rude épreuve.
Le nouveau coéquipier de Verstappen,
Sergio Pérez, est le plus rapide lors de la
première session d’essais libres du weekend,
mais dans l’après- midi, les deux
Red Bull perdent le rythme. Sergio Pérez
termine neuvième. Max Verstappen fait
un peu mieux avec sa quatrième place,
mais il reste toujours à quatre longs
dixièmes de Charles Leclerc qui mène
la danse avec sa Ferrari.
Et surtout, il est juste derrière Lewis
Hamilton. « Nous sommes trop lents,
déplore-t-il. D’habitude, je me sens
assez à l’aise dans la voiture, je trouve
mon rythme rapidement, mais pas cette
fois-ci. Ça ne me plaît pas. C’est le weekend
le plus difficile de la saison. »
Et en alimentant la guerre psychologique,
Lewis Hamilton ne fait rien pour
simplifier les choses. Lorsqu’on l’interroge
sur les duels musclés qui se déroulent
sur le circuit, le pilote Mercedes tente
de prendre l’ascendant. « Je pense avoir
réussi à éviter tout accident éventuel,
affirme-t-il. Mais il nous reste 19 courses,
et un accrochage est toujours possible.
[Max] a peut-être le sentiment d’avoir
beaucoup à prouver. Je ne suis pas dans
GETTY IMAGES
58 THE RED BULLETIN
« À présent,
notre voiture
peut enfin
concurrencer
Mercedes. »
La Red Bull Racing RB16
a été modifiée pour la saison
2021 du championnat. Elle
dispose notamment de nouveaux
sidepods et d’un groupe
propulseur Honda amélioré.
« Il existe
d’autres circuits
urbains, mais
on ne peut pas
se sentir plus
à l’étroit qu’à
Monaco. »
Sur le circuit étriqué et tortueux
de Monaco, qui s’étend de Monte-
Carlo jusqu’au quartier voisin de
La Condamine, il est pratiquement
impossible de doubler.
Max Verstappen
GETTY IMAGES
On prend Verstappen de haut : le pilote néerlandais s’en va célébrer
son butin à Monaco. Et envisage déjà la suite, dans un mode apaisé.
la même position que lui. » Max Verstappen
sourit et refuse de mordre à l’hameçon.
« Nous avons combattu avec ardeur
et évité les contacts chacun de notre
côté. Espérons continuer comme ça afin
de rester tous deux sur le circuit et poursuivre
notre affrontement. »
Pendant les qualifications du samedi,
Max Verstappen confirme sa réputation
de futur champion qui le suit depuis qu’il
a été le plus jeune vainqueur dans cette
catégorie lors du Grand Prix d’Espagne
2016. Les qualifications, c’est le moment
où les vrais champions de F1 excellent.
Les courses de F1 modernes sont
des exercices de maîtrise technique qui
englobent des notions extrêmement
complexes de gestion des pneumatiques,
d’économie de carburant, ou encore
de déploiement de l’énergie tactique
des groupes propulseurs hybrides. De
leur côté, les qualifications sont la substantifique
moelle de la course : elles
représentent l’alliance entre l’homme
et la machine, avec la plus petite quantité
de carburant possible, et un engagement
absolu aux limites de l’adhérence.
Or, sur le circuit de Monaco où il est
quasiment impossible de doubler et où
les résultats reflètent régulièrement la
grille de départ, les qualifications sont
primordiales.
Cette étape se solde par l’élimination
des cinq pilotes les plus lents après chacune
des deux premières séances, laissant
au final les dix meilleurs se battre
pour la pole position pendant douze
minutes d’une intensité incroyable. Ratez
vos qualifications, comme Max Verstappen
en 2016, et vous feriez tout aussi
bien de rester au lit le dimanche.
Réussissez-les, et l’un des prix les
plus prestigieux dans le milieu des sports
mécaniques est soudain à votre portée.
À Monaco, où les risques sont sensiblement
accrus du fait de la proximité des
rails et où les erreurs ne pardonnent pas,
Max Verstappen choisit son moment
pour briller… ou presque.
Après avoir réussi haut la main les
deux premières séances, il se maintient
lors de la phase finale des qualifications
et réussit à surpasser le héros local,
Charles Leclerc, qui détenait le meilleur
temps provisoire. Max Verstappen est
1 500 millièmes de seconde plus rapide
que le Monégasque pendant le premier
des trois secteurs du circuit – le retard
de jeudi est de l’histoire ancienne – mais
devant lui, Charles Leclerc heurte violemment
le rail de la piscine. Dès que sa
Ferrari accroche le rail à l’extérieur, le
drapeau rouge est levé. Cela signe la fin
du tour de Max Verstappen et le cantonne
à la deuxième place sur la grille de
départ. Mais s’il éprouve de la frustration,
le jeune Néerlandais n’en laisse rien
paraître. Devant la presse, Verstappen
ne blâme absolument pas le pilote de la
Ferrari, affirmant qu’il n’y avait aucune
raison de révoquer sa pole position.
« Une action intentionnelle mérite
certainement la révocation. Or, ce n’était
pas le cas ici. Charles n’avait rien prémédité,
explique-t-il aux journalistes à l’affût
de la controverse. Nous repoussons tous
les limites, et une erreur est vite arrivée.
Dans l’ensemble, je suis très content. »
On peut dire que Verstappen a un bon
karma. Notons par ailleurs que Lewis
Hamilton, mécontent de sa voiture, se
trouve cinq places plus loin sur la grille.
Dimanche. Il reste trente minutes
avant le début de la course. La
pit lane ouvre et les voitures s’engouffrent
sur la piste pour accéder
à la grille de départ. Alors que Charles
Leclerc monte la côte en direction de la
place du Casino, on entend son cri de
désespoir jaillir de la radio. « Non, non,
non, pas la boîte de vitesses ! » Le pilote
Ferrari se réengage dans la pit lane et
le diagnostic tombe : l’arbre de transmission
a été endommagé par l’accident
de la veille. Max partira donc en tête
de la course.
Lorsque les lumières s’éteignent, le
Néerlandais brille une fois de plus. Après
avoir rapidement fermé la porte à tout
débordement éventuel, il mène la course
avec brio. Et pendant que Lewis Hamilton
se retrouve coincé derrière des voitures
plus lentes et lambine à la septième
place, Max Verstappen prend confiance
et remporte avec élégance et sans coup
férir sa première victoire à Monaco.
En cette fin de week-end, Verstappen
domine la saison 2021, quatre points
devant Hamilton : le champion immortel
vacille. Max Verstappen version 2021
sera peut-être le pilote qui rapportera
enfin un titre à Red Bull après huit ans de
disette. Mais en ce dimanche à Monaco,
le Néerlandais ne veut pas trop s’avancer…
Depuis, et au moment où nous bouclons
ce numéro, il a aussi remporté les
GP de France, de Styrie et d’Autriche.
« Je veux juste me concentrer sur la
course à venir, déclare-t-il. Je refuse de
mettre une pression inutile sur quiconque
ou de parler à tort et à travers.
Je n’ai pas besoin de battage médiatique.
Rêver ? Ça ne mène nulle part. »
verstappen.com ; redbull.com
THE RED BULLETIN 61
En roue
libre
Comment la Bike Life s’est
emparée de New York.
Texte MARZ LOVEJOY
Photos BEN FRANKE
62
Jae Milez, un natif du Bronx
vivant à Manhattan, en pleine
démo de l’esprit Bike Life dans
le Washington Square Park.
Bike Life
Si
vous habitez New York, vous avez sans
doute déjà vécu cette scène surnaturelle :
simple marcheur, vous voilà soudain en
train de nager au beau milieu d’un océan
de cyclistes latinos et afro-américains.
Comme une lame de fond, ils déferlent
sur tout un quartier, debout sur leurs
selles ou enchaînant les figures et autres
wheelings défiant les lois de la gravité.
Jae Milez, 23 ans, né dans le Bronx et
élevé de l’autre côté du fleuve à Dyckman,
ne se déplace plus que sur la roue arrière
de son vélo (il a même carrément ôté la
roue avant). À le voir s’élancer avec ses
compagnons de route, on est gagnés par
cette euphorie et cette liberté.
Soudain, ils disparaissent, roulant déjà
vers un autre quartier de New York, l’une
des nombreuses villes américaines à
revendiquer et à mettre en valeur cette
culture marginale. Un phénomène qui
s’étend à Newark, Boston, Philadelphie,
Baltimore, Oakland et Los Angeles. La
Bike Life, c’est un terme qui réunit le vélo
et la vie. Une sous-culture qui, comme
tant d’autres mouvements socioculturels,
est née de la souffrance pour être sublimée
par la créativité. Prolifiques, ces
cyclistes passent leur temps à inventer de
nouvelles figures et à perfectionner leur
talent. C’est leur mode de vie, un mélange
de passion pour le vélo, de positivisme…
et d’une sérieuse envie de s’amuser.
La Bike Life a beau être une culture
majoritairement masculine, les filles ne
sont pas en reste quand il s’agit de raser
le bitume. De plus en plus nombreuses
ces dernières années à grossir les rangs
du peloton, elles alignent les wheelings
et autres figures avec style et dextérité.
C’est le cas de la rideuse Curly. En 2017,
cette jeune fille originaire de la Lower
East Side traîne dans son quartier quand
elle voit un groupe de garçons défiler
Plus new-yorkais,
tu meurs : un petit
groupe de bikers sur
le pont de Brooklyn
avec Manhattan en
arrière-plan.
64 THE RED BULLETIN
« La vie est devenue plus belle sur
une roue. Chaque jour, je fais naître des
sourires sur mon passage. » JAE MILEZ
THE RED BULLETIN 65
Bike Life
devant elle, roue avant en l’air. « C’est ce
qu’on appelle le destin, explique Curly.
Cette sensation qu’une chose est faite
pour toi. Mon seul but désormais est de
garder ma roue en l’air. »
Curly reconnaît qu’il lui a fallu énormément
de temps pour maîtriser ces
figures. « Au début je n’étais pas trop sûre
de moi, du coup je m’entraînais toute
seule sur un parking, raconte-t-elle.
Mais j’ai décidé de sortir de ma zone de
confort. Ce n’est pas seulement un sport
de mecs. » La discipline demande du
temps et du talent. Originaire du Bronx,
Obloxkz, alias O, est adepte de la Bike
Life depuis quatre ans. Au bout de deux
ans de pratique, il s’est fait sponsoriser
par Throne Cycles, une entreprise de
vélos urbains de Los Angeles. Il suffit de
l’observer pour comprendre pourquoi.
Zigzaguant entre les voitures, les pieds
sautant sur les pédales, la main frottant
le sol alors que son vélo est à la verticale,
Obloxkz a clairement les compétences
d’un athlète professionnel. « On nous
juge sur ce qui est visible, dit-il. J’aimerais
juste qu’on nous respecte autant que
les riders BMX. »
La Bike Life devient plus connue, plus
commerciale, plus politisée et malheureusement,
plus contrôlée. Faire du vélo
dans la rue semble une pratique anodine,
mais des problèmes plus larges de justice
sociale et de pratiques discriminatoires
des forces de police ont un impact considérable.
Disons-le tout net : les chiffres
concernant le nombre de jeunes cyclistes
noirs et latinos verbalisés dans la ville de
New York sont très préoccupants. Selon
la direction des transports de New York,
plus de 86 % des cyclistes verbalisés en
ville en 2018 et 2019 étaient noirs et hispaniques.
Près de la moitié de ces contraventions
concernaient des cyclistes âgés
de 24 ans ou moins, et 51 % des cas
impliquaient des jeunes Afro-Américains.
Une attitude hostile qui reflète l’injustice
« Le vélo est fédérateur », assure Milez, 23 ans ; farouche défenseur
de la communauté Bike Life, il prend les wheelings très au sérieux.
ambiante et les carences en matière de
pratiques équitables, notamment envers
les cyclistes noirs et latino-américains
féminins, les jeunes filles, les personnes
non-binaires, les membres de la communauté
LGBTQI ou les personnes issues
des quartiers défavorisés.
Je suis une femme noire, je vais avoir
30 ans et je fais du vélo depuis dix ans.
Être une cycliste noire, c’est se livrer au
danger, à la peur, à l’angoisse. J’en suis
bien consciente, mais c’est la seule
« Le vélo, c’est un exutoire plus positif
que n’importe quel jeu vidéo ou réalité
virtuelle. » JAE MILEZ
manière de faire bouger les choses. À
l’heure actuelle, la discrimination est
encore trop réelle, elle gangrène tous les
éléments d’une culture, et celle du vélo
n’est pas en reste : dans un article examinant
les origines racistes, sexistes et classistes
du cyclisme, l’auteur Taz Khatri énumère
les préjugés encore trop présents en
matière de race, de sexe et de socio-économie,
soulignant que « les clubs cyclistes
excluaient explicitement les Afro-Américains,
les Américains d’origine asiatique,
les pauvres et les Amérindiens ».
Des données consternantes qui en
disent long sur ce que cela représente
d’être un cycliste noir ou latino-américain.
Une seule solution : l’accessibilité. Ce sera
la clé de l’acceptation sociale. Dans des
interviews séparées, Jae, Curly et O
évoquent la liberté, l’amitié, et décrivent
le sens que le vélo donne à leur vie.
66 THE RED BULLETIN
Obloxkz, originaire du Bronx,
a un sponsor, 18 000 followers sur
Instagram… et un désir légitime
d’être respecté pour son talent.
Bike Life
YourBoyFromBK
offre un divertissement
gratuit aux
clients déjeunant
dans le quartier de
Soho à Manhattan.
La Bike Life, c’est être dans le flow
du mouvement, c’est un mode de vie
qui apporte positivité et bien-être.
69
Bike Life
Oui, la Bike Life réunit des petits prodiges qui s’entraînent jour et nuit. Mais le noyau dur
de cette culture est avant tout une communauté soudée de passionnés.
« J’ai vu des membres de gangs
adverses se réunir pacifiquement pour
partager leur amour du vélo. » JAE MILEZ
Amoureux de la Bike Life, Jae cherche
de nouvelles solutions. Il est favorable à
la création d’espaces intérieurs afin de
s’entraîner librement sans se soucier de
la météo, des conducteurs agressifs ou de
la police. Conscient des enjeux politiques
de la situation, il rencontre régulièrement
le chef de police de son quartier. « Le vélo
est fédérateur, dit-il. J’ai vu des membres
de gangs adverses se réunir pacifiquement
juste pour partager leur amour du
vélo. Un exutoire plus positif que n’importe
quel jeu vidéo ou réalité virtuelle. »
Il pense qu’une fois que les autorités
auront compris tous les bénéfices que
représente la Bike Life pour les jeunes,
elles prendront davantage en compte les
initiatives liées au vélo dans leurs politiques
publiques. La législation et les comportements
suivront.
Pour moi, le vélo a longtemps été un
sport solitaire, je n’avais que deux amis
qui en faisaient. Tout a changé en 2016
lorsque j’ai (littéralement) croisé le chemin
de Q dans les rues de New York. Mon
mari et moi, on rentrait du travail à vélo
quand soudain, on s’est retrouvés plongés
dans un océan de bikers. Leur joie était si
communicative qu’on a décidé de faire un
peu de route avec eux. J’en ai profité pour
me présenter à Q, vice-président d’Only
The Rocketz, un club de cyclistes de New
York. Et voilà. Tout d’un coup, j’avais un
lien personnel avec la Bike Life.
Mais la pandémie est venue bouleverser
la vie des cyclistes. Le quotidien a
changé : avec moins de circulation, les
salles de sport fermées, et l’ennui général
provoqué par la pandémie, les Américains
ont commencé à enfourcher leur vélo
comme jamais auparavant. Les ventes
de vélos au printemps et à l’été 2020 ont
augmenté de plus de 80 % par rapport à
l’année précédente. Si la Bike Life a été
touchée par le virus, elle l’a également été
par l’actualité, tout comme beaucoup
d’autres aspects de notre société. Nous
avons subi une prise de conscience lente
et douloureuse en termes de justice
sociale, et ma passion occasionnelle a pris
une nouvelle ampleur : en réponse au
poids d’être une femme noire, confrontée
à la brutalité policière et au sentiment
d’injustice provoqué par les violents assassinats
de George Floyd, Breonna Taylor et
de nombreux autres Afro-Américains, j’ai
participé au lancement de la première
édition annuelle de … And Still We Ride,
une sortie à vélo rendant hommage aux
femmes noires. Épaulée par Q et de nombreux
bénévoles, j’ai organisé une grande
manifestation réunissant des amoureux
de la Bike Life et des gens qui n’étaient pas
monté sur un vélo depuis des années. Jae
Milez s’est joint à nous et a parcouru cinquante
kilomètres en roue arrière.
Notre manifestation a été reprise dans
tout le pays, puis le mouvement s’est propagé
dans le monde entier en signe de
solidarité. Les gens étaient ultra motivés,
solidaires et complètement dingues. Ils
sont sortis dans la rue pour s’exprimer,
leurs corps en mouvement comme
autant d’actes de protestation. La maladie,
le meurtre et le chaos les ont poussés
à l’action, une expérience douce-amère
qui nous a définitivement changés.
Des lueurs d’espoirs sont nées de cette
tragédie: des activistes en herbe prennent
la parole, des gens font appel à la communauté,
des groupes marginalisés se
70 THE RED BULLETIN
« Ce n’est pas seulement
un sport de mecs », déclare
Curly, qui passe des
heures à perfectionner sa
technique du wheeling.
La Bike Life est bien
plus qu’un sport : c’est
une forme d’expression,
un moyen d’affirmation
et une passion.
THE RED BULLETIN 71
Le duo fait monter la
sauce dans le quartier
de Chinatown à New
York. Ici, El Arte saute
au-dessus de son pote
Luis Banks.
Bike Life
Sur sa roue arrière, Luis Banks apporte une énergie dynamisante dans cette zone
piétonne de Manhattan écrasée par la monotonie.
mobilisent, nous allons toujours de
l’avant. Mais comme le souligne O, beaucoup
de jeunes ont peu ou aucun revenus.
Difficile pour eux d’acheter un vélo.
« Si j’avais 100 vélos sous la main, je les
donnerais tout de suite », ajoute-t-il, précisant
qu’un bon vélo peut coûter entre
700 et 1 000 dollars. Euphorique, il nous
explique son projet de collaboration avec
des entreprises privées pour organiser
des remises de vélos et des cours de création
de contenu. C’est tout simple : offrez
des perspectives intéressantes aux jeunes
et ils y consacreront le temps et la concentration
nécessaires. Mais outre l’aspect
financier, c’est aussi l’infrastructure des
quartiers défavorisés qui freine les jeunes.
Pas facile de construire une culture du
vélo au milieu des nids-de-poule, dans
des rues sans pistes cyclables ni panneaux
de signalisation indiquant le droit des
cyclistes à circuler. Pas étonnant que les
cyclistes ressentent le besoin d’envahir les
rues en masse pour se sentir en sécurité.
Je suis née à Minneapolis, l’une des
villes les plus cyclables d’Amérique, et je
vis actuellement à Copenhague, l’une des
villes les plus cyclables au monde. J’ai
remarqué que les villes qui ont investi
dans des infrastructures cyclables ont
beaucoup à nous apprendre. À Copenhague,
les habitants à vélo prennent
« On nous juge sur ce qui est visible.
J’aimerais juste qu’on nous respecte
autant que des riders de BMX. » OBLOXKZ
moins de congés maladie et font économiser
1 euro par kilomètre parcouru à
la sécurité sociale. La Bike Life est une
activité sportive et artistique, mais les
avantages vont bien plus loin : une
société en meilleure santé physique et
mentale, une réduction de l’empreinte
carbone, des économies sur les coûts de
stationnement et les véhicules, une
réduction de la criminalité, des opportunités
de développement économique,
des avantages en termes d’équité sociale.
C’est surtout sur le plan personnel que
ses avantages se ressentent. « Le vélo est
synonyme de communauté et de famille,
déclare Obloxkz. Quoi que tu fasses,
même si c’est autre chose que du vélo,
donne-toi à fond. »
La Bike Life, c’est être dans le flow
du mouvement, une culture et un mode
de vie qui apporte positivité et bien-être.
Alors, la prochaine fois que vous vous
retrouverez plongé dans un océan de
cyclistes, posez-vous cette question :
« Où est ma place ? »
THE RED BULLETIN 73
PRÊT À ATTEINDRE
VOTRE PIC DE FORME ?
Pour votre santé, pratiquez une activité physique régulière. www.mangerbouger.fr
PERSPECTIVES
Expériences et équipements pour une vie améliorée
GONFLÉ À BLOC
Une visite des blocs
du Tessin en compagnie
du maestro Giuliano
Cameroni en Suisse
méditerranéenne.
STEFAN KUERZI/RED BULL CONTENT POOL SIMON SCHREYER
75
PERSPECTIVES
voyage
« La plus grande
concentration de
passages ardus en
Europe se trouve
dans le Tessin. »
Le pro de l’escalade Giuliano
Cameroni, 24 ans, nous parle
de sa terre natale
Je n’étais pas né que, déjà, j’escaladais
les blocs du Tessin. Ma mère
ne ratait jamais une occasion
de faire du bloc, même lorsqu’elle était
enceinte. Mon jeune frère Diego et surtout
mon père Claudio sont également
connus chez moi en tant que grimpeurs.
Mon père a même écrit quatre guides
reconnus consacrés au Tessin. L’escalade
est donc une véritable affaire de famille
chez nous. Et les zones de blocs de la
région constituaient mon terrain de jeu
alors que je n’avais pas encore soufflé
mes cinq bougies.
Il y a quatre zones importantes de
blocs dans le Tessin : Cresciano, Chironico,
Brione et le col du Saint-Gothard. Elles
sont toutes de première catégorie : les
blocs de granit et de gneiss offrent des
structures compactes qui offrent des
prises. Il arrive rarement que l’une d’elles
se casse. De plus, les blocs se présentent
de telle manière que les mouvements
semblent se décider d’eux-mêmes.
On dirait que la Création a réfléchi
pour nous. Dans le Tessin, il y a une plus
grande concentration de passages ardus
que n’importe où ailleurs en Europe. Et
c’est exactement ce qui stimule les
Chez-soi de pierre : le pro de l’escalade Giuliano Cameroni sur un bloc dans le Tessin.
Tourbillons naturels du
ruisseau de montagne
limpide du Val Verzasca,
dans le Tessin. Un coup
de frais après avoir
escaladé les blocs.
76 THE RED BULLETIN
Comment
s’y rendre
En voiture : depuis Zurich,
vous pouvez rejoindre le
tunnel du Saint-Gothard en
environ 1 h 30 (sans péage).
Une vignette autoroutière
pour dix jours coûte 9,40 € /
10,29 CHF. Nous vous recommandons
d’y faire un
arrêt car le col du Saint-
Gothard est un bloc de rêve.
Si vous empruntez le tunnel,
vous atteindrez Bellinzone
une heure après la sortie.
De là, il ne vous faudra que
quelques minutes pour
gagner Cresciano.
Berne
En train : la durée du voyage
de Zurich à Bellinzone est
d’environ 2 heures. Prix des
billets : 71 € / 77, 8 CHF.
Suisse
CANTON DU TESSIN
Cresciano
Lugano
Zurich
Le village de Lavertezzo du Val Verzasca : pour faire du bloc et se baigner dans la nature.
STEFAN KUERZI/RED BULL CONTENT POOL, EVOLUTIONCENTER.CH,
GETTY IMAGES (2) SIMON SCHREYER
grimpeurs ambitieux. Mon expérience
m’a fait réaliser que chaque pierre possède
sa propre énergie.
Que vous soyez débutant
ou expert, ici tout le monde
peut grimper
Voici trois blocs en détail. Ils sont situés
dans ma région préférée, Cresciano.
Commençons par le plus difficile, le
niveau de difficulté (qui peut s’élever
jusqu’à 9a) est indiqué entre parenthèses
: Dreamtime (8b+/8c), 7 mètres
de long, 3 mètres de haut, est un classique
avec vingt et un mouvements suivis
d’un jeté ou dyno à la sortie. La voie
passe dans un dévers à 50 degrés, se
S’il pleut : centre d’escalade Evolution à Taverne.
Bon à savoir
Hébergement : Barbara et Cornelia
gèrent l’Ostello Cresciano qui devient
de plus en plus populaire auprès
des grimpeurs. Le petit-déjeuner est
inclus, le wifi est gratuit et le salon
confortable. Les alternatives incluent
Airbnb ou trois campings (Al Censo,
Bellinzone ou Agriturismo La Finca)
si vous arrivez en monospace.
Pour les journées pluvieuses,
il y a deux salles de blocs : Alpha
Boulder à Giubiasco et le centre
d’escalade Evolution (photo de
gauche) à Taverne.
Infos : ostello-cresciano.online
THE RED BULLETIN 77
PERSPECTIVES
voyage
Le Ponte dei Salti, dans le Val Verzasca, invite les casse-cou à se jeter à l’eau.
monte de droite à gauche avant de
revenir par le milieu. Ce que j’aime ici,
c’est la fluidité des mouvements.
La grotte des soupirs (7c), 4 m de
long, 2 m de haut, est un toit caverneux
avec de larges prises. Elle propose
une séquence qui n’est pas trop
difficile, mais qui demande de l’énergie.
Les efforts demandés et l’acoustique
ont inspiré le premier grimpeur,
Fred Nicole, à lui donner ce nom.
Il Cerchio Celtico (6a+), 4 m de
long, 2 m de haut et probablement
un ancien site de culte celtique, est
situé sur une colline qui offre un panorama
incroyable. Cinq voies qui
servent d’échauffement pour les experts,
ou de point de départ pour les
débutants, mènent au bloc.
La plupart des blocs sont cachés
au plus profond du paysage sauvage,
loin de la civilisation. Autre atout de la
région : dans le Tessin, on peut grimper
toute l’année et le soleil est très souvent
au rendez-vous !
« Dans le Tessin,
la roche parle aux
grimpeurs. »
Giuliano Cameroni, 24 ans, pro du bloc
Pour se rafraîchir,
une baignade dans
le Val Verzasca
En outre, il se dégage de la région
une atmosphère paisible. S’il y a trop
d’animation à Cresciano (ce qui arrive
rarement), vous pouvez toujours
aller à Chironico dans le district de
Léventine.
Pour nous rafraîchir, mes amis
et moi aimons nous baigner dans le
Val Verzasca. Le ruisseau de montagne
limpide de cette vallée idyllique
crée des tourbillons naturels avec
des courants agréables. Alternative
attrayante : Ponte Brolla dans la vallée
voisine de la Maggia. Vous pourrez
y sauter dans l’eau depuis des hauteurs
de plusieurs mètres et parfois
observer des plongeurs de falaise
professionnels.
Plus sur Giuliano Cameroni :
Instagram : @giuliano_cameroni ;
redbull.com
GETTY IMAGES, STEFAN KUERZI/RED BULL CONTENT POOL SIMON SCHREYER
78 THE RED BULLETIN
HORS DU COMMUN
Retrouvez votre prochain numéro en août en abonnement avec et avec ,
dans une sélection de points de distribution et sur abonnement.
LORENZ HOLDER/RED BULL CONTENT POOL
ALLER MIEUX
Bienfaits froids
Piquer une tête dans une eau glacée peut sembler fou, pourtant cela peut
changer votre vie comme le révèle la fondatrice des Mental Health Swims.
En ce 1 er janvier 2019, Rachel
Ashe, 34 ans, participe à son
premier Loony Dook, un événement
consistant à prendre
le jour de l’an un bain de mer
dans l’eau glacée de l’estuaire
du Forth, près d’Édimbourg
(Écosse). « J’étais dans un sale
état, mais j’ai couru avec des
centaines de personnes et j’ai
sauté dans l’eau. » Une eau à
un ou deux degrés. « Après le
choc, j’ai ressenti un calme
profond, cela ne m’était pas
arrivé depuis des années.
Ce fut une révélation. »
Depuis l’enfance, Ashe
souffre de troubles psychiques
; en 2018, elle est
diagnostiquée borderline.
Ce premier bain glacé l’incite
à poursuivre la pratique chez
elle, à Swansea (Pays de
Galles). Et ça marche, son
état mental s’améliore sensiblement.
« En hiver, j’étais
souvent dépressive. Les bains
de mer ont éclairci mon horizon.
Le froid mordant produit
un incroyable effet sur la
peau. J’ai le sentiment que
tout redevient possible. »
Après neuf mois de pratique
sous les orages et la
grêle, Ashe organise la première
édition de la Mental
Health Swim (trad. nage pour
la santé mentale) à Caswell
Bay, à 10 km de Swansea. « Je
tenais à me retrouver dans la
mer avec des personnes qui
m’acceptent comme je suis,
quels que soient mes états
d’âme. » Près de trente personnes
répondent à l’appel,
« Plonger dans
l’eau froide me
force à sortir de
ma tête. »
PERSPECTIVES
fitness
Frisson de joie :
Rachel Ashe
(à droite) et
sa compagne
Cory Hughes.
de quoi encourager Rachel à
rendre cette rencontre mensuelle.
Aujourd’hui, la Mental
Health Swim compte près de
90 groupes à travers le
Royaume-Uni.
En quoi l’eau froide améliore-t-elle
le bien-être mental
? Le Dr Mark Harper, directeur
de Mental Health Swims
et anesthésiste au CHU de
Brighton et de Sussex, étudie
les bienfaits de ce type de baignade
et ses effets sur l’inflammation.
De plus, des tests
montrent que l’exposition au
froid aide à traiter la dépression
et l’anxiété. « L’immersion
en eau froide n’est pas un
remède, précise le Dr Harper,
mais elle procure un ensemble
d’avantages — exercice,
sociabilité, autonomie, réussite,
plaisir — qui, associé à
l’eau froide, est étonnamment
bon pour la santé mentale. »
L’immersion peut
accroître la résilience
« L’eau froide est un facteur de
stress pour le corps, explique
Rachel Ashe. Parvenir à surmonter
le choc de l’immersion
facilite la gestion du stress
quotidien. La méditation
consciente ne m’a pas été
bénéfique, j’avais tendance
à fabriquer ma pleine
conscience. Plonger dans
l’eau froide me force à sortir
de ma tête. Beaucoup d’entre
nous portent leur anxiété dans
la poitrine. Le fait de pénétrer
lentement dans l’eau libère
cette anxiété sous l’effet du
froid qui pénètre par les pieds
et remonte le long du corps. »
En bonne compagnie
« Le confinement a boosté les
Mental Health Swims, confie
Ashe. Le sentiment d’isolement
a touché beaucoup de
personnes au cours de l’année
écoulée, les baignades ont été
un réel soutien, une occasion
de renouer des liens sociaux.
Je veux montrer à ceux qui
luttent pour leur santé mentale
qu’ils sont plus forts qu’ils
ne le pensent. »
Pas d’équipement
spécifique requis
« Portez ce qui vous plaît,
maillot de bain, combinaison
de plongée, tee-shirt et leggings,
qu’importe. L’essentiel
est ailleurs, dans le fait de
plonger dans l’eau froide et
d’en ressentir les bienfaits,
de passer du temps avec ceux
qui vous comprennent. »
Faites trempette,
pas des longueurs
« Soyez toujours à l’écoute de
votre corps. Ne nagez jamais
seul. On ne prépare pas un
triathlon. Parfois, le simple
fait de s’enfoncer dans l’eau
jusqu’à la taille suffit. Les
séances sont encadrées par
des secouristes formés aux
troubles psychiques et aux
règles de sécurité en eau
froide, identifiables grâce à
leur drapeau de pirates rose. »
Instagram :
@mentalhealthswims
LAURA MINNS NINA ZIETMAN
80 THE RED BULLETIN
PERSPECTIVES
fitness
HYDROW TOM GUISE
RAMER
Aviron à réaction
En plus de vous mettre en forme, ce rameur d’intérieur
vous transporte sur les cours d’eau du monde entier.
« Je peux vous apprendre à ramer en trois secondes », affirme Bruce Smith. Ce Bostonien
de 51 ans est l’ex-entraîneur de l’équipe nationale d’aviron des États-Unis. Aujourd’hui,
avec Hydrow, sa version révolutionnaire du rameur d’intérieur, Smith se lance dans le
domaine du fitness high-tech. « L’aviron fait travailler 86 % du corps, renforce la densité
osseuse et ménage les articulations, contrairement à la course à pied », explique-t-il. Estimant
les anciens rameurs d’intérieur bruyants et encombrants, Smith voulait procurer la
sensation de fendre l’onde. Hydrow y parvient grâce à un mécanisme électromagnétique
contrôlé par ordinateur qui modifie la résistance jusqu’à 240 fois par seconde pour correspondre
aux entraînements à l’écran, filmés en direct sur de véritables cours d’eau. Les
utilisateurs peuvent se connecter en ligne et ramer en groupe. « Avoir l’impression d’être
sur l’eau et travailler en parfaite synchronisation avec ses coéquipiers procurent une sensation
particulière, dit Smith. C’est méditatif et énergisant. » hydrow.co.uk
Les utilisateurs
de Hydrow se
connectent pour
ramer ensemble,
et aussi partager
leurs questions,
leur motivation et
leurs conseils.
THE RED BULLETIN 81
PERSPECTIVES
gaming
Prenez vos repères
« Dans la zone, interdiction
de se perdre, explique
Nimara, qui vit en Roumanie.
Souvenez-vous des points de
repère et de leur emplacement.
Utilisez une boussole
et ne perdez pas de vue l’endroit
où vous vous trouvez
sur la carte. » Et s’il est trop
difficile de voir devant vous
(comme en cas de blizzard
intense), réfléchissez avant
de continuer.
Dormez malin
Le bon sens devrait toujours
dicter l’endroit où vous dormez.
« Nous n’obligeons pas
les joueurs à camper dans
des endroits spécifiques mais
il est sage d’observer les ressources
à portée de main. Ne
campez pas là où vous n’êtes
pas protégé des éléments, ou
dans un endroit dangereux. »
SURVIVRE
Virtuel ou naturel ?
Quittez la ville pour les grands espaces depuis le confort
de votre fauteuil de gamer. Mais allez-y préparé...
« Quand on veut saisir une
simple chose dans la nature,
on s’aperçoit qu’elle est liée au
reste du monde », écrivit John
Muir, explorateur de légende,
défenseur de l’environnement
et père de l’important système
des parcs nationaux
américains, après avoir vu
pour la première fois les montagnes
de la Sierra Nevada en
1869. Une sensation que les
joueurs d’Open Country, un
nouveau défi de plein air de
l’éditeur de jeux italien 505
Games, partageront sous peu.
En contrôlant un personnage
qui troque sa vie urbaine
pour la nature, vous êtes lâché
dans une gigantesque simulation
immersive de grands
espaces inspirée par les parcs
nationaux de Yellowstone et
de Yosemite. La compréhension
de l’interconnexion de la
nature est ici vitale pour la
survie : le bois permet de
construire des abris et sert de
combustible, les traces
mènent à des animaux et les
rivières vous guident vers une
végétation luxuriante.
« Le jeu vous permet de
vous frotter à la vie en plein
air en utilisant des techniques
de brousse, de chasse et de
pêche pour survivre, explique
Tudor Nimara (photo),
concepteur principal des
développeurs du jeu, FUN
Labs. Mais nous voulions
aussi des moments où vous
pouvez simplement contempler
les vues magnifiques et
reconnecter avec la nature. »
Voici quelques-unes des
compétences en matière de
nature sauvage que vous
découvrirez dans le jeu et qui
pourraient s’avérer utiles pour
votre prochaine aventure dans
la vie réelle...
« Ce jeu peut
combler votre
côté plein air. »
Le bon vêtement
Dans le jeu comme dans la
vie, la météo est imprévisible
et vous devrez vous adapter.
« Les joueurs doivent bien
s’équiper. Vous devez donc
utiliser les bons vêtements,
réagir si vous avez chaud et
soif, ou si vous avez froid.
Nous nous sommes également
penchés sur les techniques
de bushcraft (art des
bois), par exemple, la fabrication
d’un bouclier de feu. Rassemblez
du bois et mettez-le
d’un côté du feu de camp
pour qu’il serve de réflecteur ;
plus efficace. »
Votre meilleur pote
En rase campagne, vous êtes
accompagné d’un ami fidèle.
« Votre chien peut renifler les
traces d’animaux et vous
alerter en cas de danger.
Dans ce jeu, vous ne pouvez
vous déchaîner contre les
grizzlis ou autres prédateurs,
vous devez envisager de vous
éloigner. Ici, la chasse est utilitaire,
il ne s’agit pas de collectionner
les trophées mais
de mettre de la nourriture sur
le feu de camp. »
Open Country sur PS4, Xbox One
et Steam ; opencountrygame.com
STU KENNY
82 THE RED BULLETIN
© Jean Nouvel, Gilbert Lézénès, Pierre Soria et Architecture-Studio / Adagp, Paris, 2021
ALPHATAURI.COM
PERSPECTIVES
Et si… on rangeait ?
Toujours moins :
pour Millburn
(à gauche) et son
pote Nicodemus,
le bas de la photo
est superflu.
Dites adieu
au bazar
Millburn et
Nicodemus
recommandent
cinq techniques
pour s’alléger.
SIMPLICITÉ
Allégez-vous
Vous vous sentez piégé par tous vos biens accumulés ? Les
Minimalistes se libèrent de l’absurdité qu’est le matérialisme…
Pour beaucoup, le minimalisme
évoque l’esthétique :
une pièce blanche dépouillée,
la musique d’un unique instrument,
un gadget dépourvu
de boutons. Mais pour les
amis Joshua Fields Millburn
et Ryan Nicodemus, alias les
Minimalistes, c’est le secret
d’une vie heureuse.
Natifs de Dayton, dans
l’Ohio (USA), ces amis d’enfance
découvrent le minimalisme
en 2009, au moment
où Millburn subit deux grands
bouleversements en l’espace
d’un mois : le décès sa mère
et un divorce. « Ces événements
m’ont forcé à faire le
point et à revoir mes priorités
qui incluaient alors réussite,
statut social et accumulation,
explique le quadragénaire.
Un ménage américain moyen
possède jusqu’à 300 000
objets, et le mien probablement
davantage. »
En se séparant des biens
de sa mère, Millburn décide
d’en faire autant avec les
siens, et plus il se débarrasse
de ses objets, plus il se sent
libre. Déprimé, Nicodemus,
39 ans, rend visite à Millburn,
ce dernier lui suggère de l’imiter.
« Je travaillais 80 heures
par semaine et négligeais des
aspects importants de ma
vie, tels que les relations
humaines. J’ai alors cessé
de faire passer les biens
avant les personnes. »
Podcasts, blog, conférences,
livres et documentaires
Netflix, les Minimalistes
partagent leur philosophie
avec des millions de personnes
à travers le monde. Le
message est simple : le vrai
bonheur ne se trouve pas en
adhérant au capitalisme et
au consumérisme, mais en
y renonçant. « La majorité
d’entre nous passe sa vie à
accumuler des objets au lieu
de la vivre, déclare Millburn.
En possédant uniquement le
strict nécessaire, notre perception
ira au-delà du simple
monde physique et permettra
à chacun de se reconnecter
à l’essentiel. » Ou, pour citer
le titre de leur dernier livre :
« Chérissez les gens, pas les
choses ».
« Les objets ne sont pas
nos ennemis », assure Millburn,
et souligne qu’adopter
ce mode de vie n’implique
pas nécessairement de jeter
tout ce que l’on possède. « Il
ne s’agit pas de renoncer ou
de bannir les objets, mais
de posséder uniquement
ceux qui apportent une réelle
valeur ajoutée à nos vies.
90 % de nos effets personnels
sont des rebuts prétendument
essentiels qui nous
encombrent. Désencombrer
notre monde extérieur ouvre
la voie à l’épanouissement
de notre monde intérieur. »
theminimalists.com
Le pourquoi
« Posez-vous au préalable
la question suivante :
“Comment vivre mieux
avec moins ?” Si vous mettez
quelque chose au rebut
sans savoir pourquoi, celleci
sera vite de retour. »
Objets saisonniers
« Un objet non utilisé depuis
trois mois et qui ne sera pas
utilisé dans les trois mois à
venir, peut être éliminé. »
La règle
des 20/20
« Pour chaque objet que
vous conservez au cas
où, demandez-vous si
vous pourriez l’obtenir
pour moins de 20 euros
en moins de 20 minutes.
Si c’est le cas, dégagez-le.
Cela concerne généralement
deux ou trois objets
tout au plus. »
1 de plus,
10 de moins
« Séparez-vous de dix objets
pour chaque nouvel objet
acquis. Cela rendra vos
achats plus judicieux, tout
en vous obligeant à réévaluer
constamment les possessions
dont vous êtes
prêt(e) à vous défaire. »
Combustion
spontanée
« Imaginez pour un objet
donné qu’il parte soudain
en fumée. Vous seriez surpris
du nombre de fois où
vous vous sentirez soulagé.
Si tel est le cas, défaitesvous
en. »
JOSHUA WEAVER LOU BOYD
84 THE RED BULLETIN
PERSPECTIVES
agenda
DÉJÀ DISPO
RISK VS REWARD: A NAZARÉ ANTHOLOGY SERIES
Pourquoi seriez-vous prêt à tout risquer ? Pour la plupart d’entre nous, cette question n’est
heureusement guère plus qu’hypothétique. Mais pour les surfeurs de cette série, elle est
bien réelle. Nazaré, au Portugal, abrite les plus grandes vagues surfables de la planète, où
des records et des corps peuvent être et ont été battus. C’est une légende qui a déjà été
racontée, mais ce qui est rarement couvert, ce sont les enjeux humains : les familles, les partenaires
et les animaux domestiques laissés de côté dans la poursuite de ce prix. Les deux
premiers épisodes de cette série se concentrent sur les vies et les amours de la Française
Justine Dupont et du Brésilien Pedro « Scooby » Vianna, qui risquent tout. redbull.com
17 AU 19 SEPTEMBRE
VÉLO EN GRAND
Si vous aimez le vélo, ce nouveau
rendez-vous est pour vous. Organisé
sur le site (protégé) de l’île de loisirs
de Jablines-Annet, en Seine-et-
Marne (77), Vélo en Grand s’annonce
comme un rendez-vous grand public,
ouvert aux familles comme aux
sportifs, et aux convaincus comme
aux curieux du vélo. Que vous l’aimiez
urbain, électrique, pliant,
cargo, gravel, de route, de voyage ou
nature, votre vélo sera à l’honneur,
lors d’initiations, courses, randos,
animations (multiples) et même de
compétitions, comme les championnats
du monde de Wheeling (Bike
Life), la Coupe du Monde MTB Eliminator
et le Cyclo-Cross International
de la Solidarité C2. Organisé par
les équipes de Vélo Vert, dont on ne
présente plus le magazine de VTT
historique, ce premier festival du
vélo en Île-de-France devrait être
surprenant. veloengrand.com
DÉJÀ DISPO
ACCOMPLICE
L’acquisition de son premier vélo est un moment
important dans la vie de chacun. Ce film est un
hommage à ce billet pour la liberté, au lien qui
s’est tissé entre l’homme et son compagnon à
deux roues. Mais les personnes qui racontent leur
histoire ici ne sont pas n’importe qui – ce sont des
légendes du cyclisme, qui se sont engagées sur
une voie dès le moment où elles ont découvert ce
que permettait un vélo. Pour Brandon Semenuk,
ce parcours a conduit le Canadien à remporter le
Red Bull Joyride pour la première fois en 2011.
Pour l’Américain Paul Basagoitia, il s’est traduit par
une chute au Red Bull Rampage en 2015 qui l’a laissé
paralysé et a dû réapprendre à rouler. Bien plus
qu’un simple film de vélo. redbull.com
KONSTANTIN REYER/RED BULL CONTENT POOL, VÉLO EN GRAND, LUKE WALKER/SAATCHI GALLERY,
BEN MARR/RED BULL CONTENT POOL
86 THE RED BULLETIN
PERSPECTIVES
agenda
JUSQU’AU 3 OCTOBRE ‒ LONDRES
JR: CHRONICLES
L’artiste de rue français JR est célèbre pour ses collages de photos à la fois
épiques et intimes, et le monde entier est sa galerie. De 2008 à 2014, son
projet Women Are Heroes a recouvert les toits, les trains et les murs d’Europe,
d’Amérique du Sud, d’Asie et d’Afrique de photos de femmes vivant
dans des bidonvilles. Pour Giants (photo ci-dessus) en 2017, il a érigé une
imposante photocopie d’un enfant regardant par-dessus le mur de la frontière
entre les USA et le Mexique. Ces œuvres et d’autres sont présentées
dans une exposition événement à Londres qui pourrait bien justifier un
saut en Angleterre si l’actualité le permet.
Saatchi Gallery, Londres ; saatchigallery.com
17 ET 18 AOÛT
PARIS CONQUEST
Enfin, un gros événement de skate
à Paris ! Le Red Bull Paris Conquest
est une compétition internationale
de street qui rassemblera 36 riders
pros (24 hommes et 12 femmes)
qui s’affronteront dans un format
head-to-head, au sein d’un skatepark
unique composé de sept spots
parisiens iconiques reconstitués
pour l’occasion au Trocadéro (non
loin du Palais de Tokyo, place forte
du skate dans la capitale). Les noms
du Français Aurélien Giraud, de
Leticia Bufoni (Brésil) et de Nyjah
Huston (USA) sont évoqués à
l’heure où nous bouclons ce numéro.
Une retransmission en direct
vous sera proposée sur Red Bull TV
et Twitch, ainsi qu’un replay.
redbull.com
DÉJÀ DISPO
FILER CREEK
Il ne reste finalement que très peu
de rivières à explorer sur la planète.
Lorsque le Canadien Ed Muggridge
a été contacté par son collègue kayakiste
Sandy MacEwan pour effectuer
une première descente de Filer
Creek, un tronçon de 60 kilomètres
d’eau vive qui s’étend de la côte de
la Colombie-Britannique à l’océan
Pacifique, il n’a pas pu laisser passer
l’occasion. Le genre d’expédition
dont il apprécie la « rudesse ». Partagez
leur aventure en compagnie d’un
autre kayakiste, Benny Marr, avec
ce documentaire de 20 minutes disponible
sur Red Bull TV. Une source
d’inspiration pour l’esprit alors que
nous recommençons à planifier
nos propres aventures.
redbull.com
THE RED BULLETIN 87
PERSPECTIVES
moto
En route
Parce qu’il y a des virées à rattraper,
chopez le bon matos pour partir à moto.
Photos OPHELIA WYNNE
88 THE RED BULLETIN
Moto DUCATI Monster
1200, ducati.com ;
casque HEDON Bike
Shed Club Racer Carbon
Edition, hedon.com ;
veste de denim SAINT
Unbreakable Shearling
Collar, eu.saint.cc ;
t-shirt manches longues
CYCLE ZOMBIES Basecoat,
cyclezombies.com ;
jeans BELSTAFF Longton
Slim, belstaff.eu ;
chaussettes STANCE
Boyd 4, stance.eu.com ;
chaussures VANS
Sk8-Hi, vans.fr
Ci-contre : moto
HUSQVARNA Svartpilen
125, husqvarna-motorcycles.com
;
veste cuir coquée Pink
et crop top Laurie
EUDOXIE, eudoxie.shop ;
jeans SAINT Unbreakable
High Rise Skinny,
eu.saint.cc ;
casque HEDON Hedonist
Glass Ash, hedon.com ;
lunettes 100 % Barstow,
100percent.com ;
chaussettes STANCE
Slacker stance.eu.com ;
chaussures VANS
Sk8-Hi, vans.fr
Moto MUTT MOTOR-
CYCLES Razorback
125cc, muttmotorcycles.com
; veste Racer
MALLE LONDON ;
mallelondon.com ;
t-shirt EUDOXIE Flor,
eudoxie.shop ; short
LEVI’S 501 Mid Thigh,
levi.com ; casque
HEDON Heroine Classic
HFI, hedon.com ;
lunettes 100 %
Barstow, 100percent.
com ; chaussettes
STANCE Boyd Staple,
stance.eu.com ;
chaussures VANS
Sk8-Hi, vans.fr
PERSPECTIVES
moto
Gauche : moto HUSQVARNA Svartpilen 125, husqvarna-motorcycles.com ; casque HEDON Bike Shed Club Racer Carbon Edition,
hedon.com ; veste de vol MALLE LONDON ML1, mallelondon.com ; surchemise P&CO Ripstop Fatigue, pand.co ; gants GOLDTOP
Short Cuff Bobber, goldtop.co.uk ; pantalon DEUS EX MACHINA Jack Mechanics, shop.eu.deuscustoms.com. Droite : moto DUCATI
Scrambler Icon Dark, ducati.com ; lunettes de soleil ZEAL OPTICS Divide, zealoptics.com ; veste P&CO Wayfare Waxed Canvas, pand.
co ; sweat ASHLEY WATSON Cardington, ashleywatson.co.uk ; casque HEDON Heroine Racer, hedon.com ; gants GOLDTOP Predator,
goldtop.co.uk ; pantalon DEUS EX MACHINA Indigo, deuscustoms.com ; chaussettes STANCE Joven, stance.eu.com ;
DUKE + DEXTER chaussures Drake Tan Hiker, dukeanddexter.com
THE RED BULLETIN 91
Casque HEDON Hedonist
Tux, hedon.com ;
veste en cuir EUDOXIE
Pink, eudoxie.shop
Lunettes de soleil
QUAY Nightfall,
quayaustralia.co.uk ;
veste BELSTAFF Pelham,
belstaff.eu ;
tee-shirt EUDOXIE
Marie, eudoxie.shop ;
jeans LEVI’S Ribcage
Straight Ankle, levi.
com ; casque HEDON
Heroine Racer Two
Face, hedon.com
93
Moto MUTT MOTORCY-
CLES Sabbath 250,
muttmotorcycles.com ;
casque HEDON Epicurist,
hedon.com ;
lunettes de soleil ZEAL
OPTICS Crowley, zealoptics.com
; sac à dos
CHROME INDUSTRIES
Barrage Freight,
chromeindustries.com ;
hoodie DEUS EX
MACHINA Venice
Address, shop.eu.deuscustoms.com
; gants
FUEL MOTORCYCLES
Rodeo, fuelmotorcycles.
eu ; pantalon P&CO 304
Service Fatigue, pand.
co ; chaussettes STANCE
Icon, stance.eu.com ;
chaussures CONVERSE
Chuck 70 Classic High
Top, converse.com
PERSPECTIVES
moto
Moto DUCATI Scrambler Icon Dark, ducati.com ; veste Sidewaze et pantalon Greasy Denim FUEL MOTORCYCLES, fuelmotorcycles.
eu ; tee-shirt à manches longues BOLT Raglan, boltlondon.com ; gants GOLDTOP Quilted Café Racer, goldtop.co.uk
Mannequins RAYANE B et HARRIET ROSE @ Select ; ETHAN DAVEY @ W ; DJ JAMES @ Supa ; coiffure et maquillage CÉLINE NONON
avec des produits Dermalogica et Paul Mitchell
THE RED BULLETIN 95
MENTIONS LÉGALES
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TRBMAG
Pour finir en beauté
Le monde d’après
Plus qu’un plongeon extrême lors de la première étape des Red Bull
Cliff Diving World Series, tenue à Saint-Raphaël le 12 juin dernier,
cette image de l’athlète tchèque Michal Navratil est un symbole : celui
d’une liberté bientôt retrouvée pour la France, avec les confinements
et couvre-feux définitivement oubliés, quelques jours seulement après
cet événement sensationnel. Un plongeon vertigineux de 27 mètres,
dans le monde d’après.
Le prochain
THE RED BULLETIN
sortira le
23 septembre
2021
ALEX VOYER/RED BULL CONTENT POOL
98 THE RED BULLETIN
L’ABUS D’ALCOOL EST DANGEREUX POUR LA SANTÉ. À CONSOMMER AVEC MODÉRATION.